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Posted on 13 mars 2008 in Vins italiens

La guerre des étoiles en Toscane

La guerre des étoiles en Toscane

Millésimes jugés en avance
La guerre des étoiles en Toscane
Quelle année donne de bons vins? En Toscane, à Montepulciano et à Montalcino, chaque fin d’hiver, les œnologues et les vignerons décernent des étoiles au dernier millésime. Reste ensuite à prouver, dans le verre, la pertinence de ce choix.
De retour de Toscane, Pierre Thomas
Les dégustations des vins toscans pourraient s’apparenter à celle des «primeurs» à Bordeaux, qui ont lieu en avril. Pourtant, cette tournée à laquelle les «consorzios» du Chianti Classico, du Vino Nobile de Montepulciano et du Brunello di Montalcino convient des journalistes du monde entier est bien différente. D’abord, peu ou pas de francophones. Ensuite, des vins dégustés qui ont déjà pris de la bouteille, puisque les législations locales imposent aux meilleurs crus toscans un long séjour sous bois, puis sous verre. Enfin, on déguste des vins mis sur le marché et non des cuvées virtuelles, préparées avant la fin de l’élevage et l’assemblage des barriques.
Une pluie d’étoiles
Les «étoiles», elles, sont données pour le dernier automne vécu par la vigne. Cette année, à Montepulciano, Christophe Olivier, le jeune bras droit du professeur bordelais Denis Dubourdieu, a décrit le 2007: «Ce sera un millésime intéressant, à aborder sans à-priori. La différence des terroirs devrait s’exprimer. Les plus tardifs d’ordinaire donneront d’excellents résultats. Le millésime, à juger sur sa durée, sera globalement réussi.» Sachant que 2007 fut plus précoce que 2006, et l’automne plus propice à la maturation lente et complète du sangiovese, le cépage fétiche de la Toscane, on voyait mal le millésime obtenir moins d’étoiles que 2006… à qui, un an plus tôt, les oracles avaient déjà décerné la note maximale de cinq sur cinq !
A quelques kilomètres de là, à Montalcino trois jours plus tard, l’œnologue Vittorio Fiore confirmait que, sans une goutte de pluie de fin août au 17 septembre, et une vendange à mi-octobre, les conditions étaient «le plus proche de l’idéal pour le sangiovese.» Et, re-cinq (étoiles) sur cinq pour le Brunello, ce grand vin rouge toscan.
Décevants 2003 et 2005
Restait alors l’exercice pratique. Par le jeu des règlements des dénominations d’origine contrôlée et garantie (DOCG), on goûtait les Vino Nobile 2005 à Montepulciano, et les Brunello 2003, à Montalcino. Ces deux millésimes ont obtenu quatre étoiles. Mais les années chaudes, comme 2000, 2003 et 2005 (où l’écart de températures entre le jour et la nuit fut faible), ne conviennent guère au sangiovese. A la lumière des dégustations d’aujourd’hui, la prudence eût commandé de ne décerner que trois étoiles au 2003. On a toujours raison après coup!
Car cette année-là suivait 2002 et ses deux étoiles. Plusieurs producteurs avaient alors préféré déclasser leur Brunello en Rosso di Montalcino, un vin plus léger produit soit dans des vignes jeunes, répertoriées comme telles, soit provenant du déclassement volontaire du Brunello. Quant à Montepulciano, 2005 paraît très hétérogène, une variabilité déjà vérifiée pour le Chianti Classico, et qui s’explique aisément par la mosaïque toscane des terroirs et des microclimats.
L’impasse sur les petites années
A ce jour, 2007 présente toutefois la garantie d’un très grand millésime, avec de petits raisins, bien mûris par un été chaud, mais aux nuits fraîches, et une vendange impeccable. Davantage qu’à 2006, également notée cinq étoiles, l’année fait penser à 2004. Celle-ci s’est avérée très bonne en Toscane. Il faut s’en souvenir au moment de garnir sa cave. Et faire l’impasse sur des millésimes plus faibles : 2002 à éviter, 2003 très hétérogène comme 2005 et 2006 à vérifier, verre en main. Mais ce ne sera pas avant 2011, à Montalcino !

Paru dans Hôtel Revue le 13 mars 2008.