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Posted on 6 avril 2010 in Actus - News

L’Absinthe comme la Raclette ou la Damassine?

L’Absinthe comme la Raclette ou la Damassine?

Absinthe

Sur la voie de
la Damassine 
ou de la
Raclette?

Le 31 mars 2010, l’OFAG distillait un communiqué de presse sur la «publication de la demande d’IGP pour l’Absinthe, la Fée verte et la Bleue». Un peu rapidement, les journalistes de service ont relayé l’information, les plus futés estimant que l’usage des trois termes mis en exergue confiné au seul district neuchâteloise du Val-de-Travers allait bénéficier de la jurisprudence de la Damassine. Vite dit!
Par Pierre Thomas
On le rappelle : l’eau-de-vie de cette petite prune, la damassine donc, ne pourra être produite que dans la République et Canton du Jura. Ainsi en a décidé le Tribunal fédéral, le 26 février 2010, en déboutant le producteur Jean-Pierre Mürset, du Landeron (NE), qui défendait l’idée que la damassine peut aussi être produite hors du Jura… L’OFAG avait octroyé l’AOC à la damassine le 16 août 2007.
Une vieille histoire d’AOC
Premier constat : on saura dans trois ans, au mieux, si l’Absinthe n’est qu’une «boisson spiritueuse élaborée à partir d’alcool éthylique d’origine agricole, d’eau et d’un mélange spécifique de plantes», confinée au seul Vallon, sous la protection d’une IGP.
Dans les repères chronologiques, on rappellera que les producteurs de bleue du Val-de-Travers déposait un dossier AOC, il y a dix ans, en 2000, soit cinq ans avant la levée officielle de la prohibition (1910 – 2005) ! Mais ni les plantes, ni l’alcool acheté à la Régie fédérale des alcools ne sont des ingrédients provenant de la région du Val-de-Travers, obligeant les producteurs à se limiter à une «indication géographique protégée» (IGP), qui garantit que le processus de transformation est localisé précisément.
Pline n’était pas du Vallon…
Mais comment le Vallon pourrait-il être le seul dépositaire du mot «Absinthe» ? Les quelque 25 producteurs locaux ont certes démontré que le consommateur, sous ce vocable, nomme le distillat et non la plante à l’origine du goût du spiritueux. Le Dictionnaire historique de la langue française Robert est moins optimiste : le mot «désigne à la fois la plante dite artemisia et la boisson qu’on en tire (depuis Pline)». Le mot apparaît en français sous le nom d’«absince» vers 1190 (!) pour qualifier un «vin d’absinthe». Donc, même si Daniel-Henri Dubied-Duval et son gendre Henri-Louis Pernod-Dubied, ont installé, à Couvet, à la fin du 18ème siècle, la première distillerie «industrielle» d’absinthe, les dérivés alcoolisés étaient largement connus auparavant…
Comme la Raclette
On risque plutôt de s’acheminer vers un débat du genre Raclette AOC Valais (terme approuvé par le Tribunal fédéral), où l’IGP serait liée au Val-de-Travers en toutes lettres sur l’étiquette. A noter que le même dictionnaire Robert ne contient pas le mot damassine, mais «prune de Damas», connue plus tard comme seule «damas». S’il en allait autrement et que la protection ne s’appliquait qu’au Val-de-Travers, les producteurs suisses et les exportateurs ne pourraient plus nommer leur absinthe de ce nom, mais devrait trouver un substantif de fantaisie.
Mais avant cela, il y a trois mois pour faire opposition auprès de l’OFAG, puis recours éventuels au Tribunal fédéral administratif et au Tribunal fédéral. Et après ce parcours juridique suisse, l’IGP demandera son enregistrement européen selon le règlement 110/2008… Les oppositions, c’est sûr, ne vont pas tarder à se manifester !
©thomasvino.com