Saint-Luc (VS) — La Bella Tolla
Bella Italia
Tout est fait pour le confort des hôtes, dans ce bijou alpin qu’est le Bella Tola, meilleur hôtel historique du pays il y a trois ans et franchisé «romantik». A l’entrée du vieux village de Saint-Luc, de la terrasse, deux conifères écimés, laissent admirer le Cervin, au fond du val d’Anniviers, sous un angle moins altier que de Zermatt.
A la tête de cette maison chargée d’un siècle d’histoire, transformée en bonbonnière alpestre, un jeune couple d’hôteliers, Anne-Françoise et Claude Buchs-Favre. Diplômés de l’Ecole hôtelière de Lausanne, ils recevront les anciens élèves à fin septembre. L’été, ils prennent part à l’animation de la station anniviarde, telle le «marché culinaire de Chandolin», où le Tessin est invité d’honneur (du 13 au 15 août), en mettant sur pied des excursions de connaissance de plantes sauvages du côté de Moiry (les 12, 19 et 26 août) ou, sous la houlette de la maîtresse de maison, un stage floral (les 10 et 11 septembre).
Des hôtes aux petits oignons
Revers de la médaille, il faut prévenir, avant de se lancer dans une escapade gastronomique. Et avoir de la chance: le soir, la véranda est réservée aux hôtes, en demi-pension. Il ne reste, alors, de la place que dans une cave valaisanne qu’on imagine cosy… l’hiver.
Le restaurant revendique l’étiquette française, mais ce sont des cuisiniers italiens qui fourbissent leurs casseroles. Lors de notre passage, nous avons opté pour le menu gastronomique (89 francs par personne, dès deux couverts). D’entrée, la terrine de foie gras s’est avérée un peu trop exubérante: adoucie par la malvoisie, contrastant avec une gelée au vinaigre balsamique et de la confiture d’oranges, plus sucrée qu’amère. Ensuite, excellente soupe de poissons, pêchée du côté de Livourne, où le «solide» était parfaitement cuit. Italie encore, avec des tagliatelles fraîches aux légumes, où dominaient tomate et petits pois, dans un fond de veau goûteux. Inspiration méditerranéenne toujours avec ce carré d’agneau en croûte d’herbes et de sésame, à la viande attendrie par une marinade, escorté d’une garniture déclinée en gratin de pommes de terre, flan d’olives et gâteau d’épinards.
Classique et cossu
Dommage que le plateau de fromages représentât, ce soir-là, la France des supermarchés: le Valais aurait pu défendre ses chances, avant de céder devant une panna cotta au basilic, son craquant aux noix et ses perles de meringue au safran. En résumé, une table classique et cossue, jusque dans l’addition. Service qui a de la répartie, «à la française», et choix de vins valaisans expliqués en trois langues, assez vaste, même si les vignerons vedettes ne peuvent pas assurer de livrer leurs meilleurs flacons.
La bonne adresse
Hôtel Bella-Tola
Saint-Luc
Tél. 027 475 14 44
www.bellatola.ch
Le vin qui va avec…
Un rouge d’enfer
La cuvée 2002 du Rouge d’Enfer de Provins-Valais a remporté un «Trophée d’excellence» au concours des Citadelles du vin, dans le Bordelais, en juin. Enfer, mais surtout fer de lance de la ligne Maître de Chais de la coopérative valaisanne. Ces flacons, élaborés par l’œnologue Madeleine Gay (la plus titrée de Suisse en concours internationaux, sa modestie dût-elle en souffrir!), ne sont plus confidentiels, puisque, tel ce rouge, ils sont tirés à 30'000 bouteilles. A près de 30 francs, on voit que le «haut de gamme» n’a pas à faire rougir les viticulteurs valaisans, sinon d’aise… Le consommateur en a pourtant pour son argent! A base de pinot noir, de cornalin, d’humagne rouge et de syrah, ce nectar, élevé en barriques, montre une maîtrise de tous ses éléments: jeune, frais, à la texture fine, alliant fruit et poivré, aux tanins serrés, d’une belle élégance. Mieux encore, le côté épicé de ce rouge exalte les épices des plats: c’est dire la puissance d’expression de cet assemblage rouge résolument moderne et de tempérament méridional.
Chronique de Pierre Thomas, dans Le Matin-Dimanche, début août 2004.