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Posted on 12 janvier 2005 in Adresses, Restos

Planfayon (FR) — Le Gurli

Planfayon (FR) — Le Gurli

Le Gurli sur Planfayon (FR)
Des roestis juste sur la barrière
Au diable la territorialité des langues, chère à quelques Fribourgeois qui se passent la patate chaude depuis des années. De la Sarine, il n’y a guère de montagnes à vache plus proches que celles qui dominent la vallée de la Singine. Pour gagner la Bärghuus Gurli, depuis trente ans, une route alpestre vous conduit sans effort depuis Planfayon.
Marche apéritive
Mais pour ceux qui croient qu’on peut anticiper la digestion, autant parquer l’auto juste avant le pont de Zollhaus et monter durant une heure et demie, droit haut dans les pâturages. Fougères et fraises sauvages adoucissent l’effort. Les flèches jaunes du tourisme pédestre jouent à cache-cache et quand vous croisez le chemin de gravier indiquant Schwarzsee, visez deux sapins étêtés par Lothar, devant vous. Traversez une forêt, longez une lisière, suivez une ligne électrique et, juste derrière un poyet, vous le voyez, le but de la journée. Un beau chalet, précédé d’une esplanade: la barrière n’est pas en röstis, mais en sapin fraîchement écorcé.
La terrasse a pris du volume: on regrette juste le mobilier de plastique blanc et les parasols (publicitaires) jaunes. Depuis quatorze ans, Hanni Maire régente un équipage de jeunes femmes — trois en cuisine, quatre au service. Dedans et dehors, il n’y a pas loin de deux cents places… Mais, les jours d’orage, il faut savoir anticiper le mouvement de repli dans la Raclette Stübli, tandis que le personnel recouvre les géraniums d’un petit avant-toit. Attention, les Valaisans, le fromage vient de Laupen (BE): ça vaut bien une bataille! Avec la fondue moitié-moitié, c’est un des «hit» de ces hauts.
Des röstis gratinés
La famille de la patronne gère cette buvette d’alpage depuis cinquante ans tout ronds. A côté du Bauerschinken (jambon de campagne à 19 fr. avec salade de pomme de terre) et de la Kräuterfondue (fondue aux herbes, 18 fr.) ou la téméraire Käseschnitte mit Ananas (croûte au fromage hawaïenne, 16 fr.), la spécialité locale, ce sont les Gurli Rösti (14 fr.). Des patates cuites maison, parsemées de lard, gratinées au four, au fromage d’alpage, et servies chaudes et dorées sur un plat en fonte. La spécialité n’a que sept ans d’âge: il a fallu attendre que l’électricité monte jusqu’ici. Les vins sont un peu «justes», avec des pots pour seul flaconnage. Mais l’ambiance est comme à la montagne, avec parfois de la musique folklorique. Et toujours le panorama du Gantrisch au Kaiseregg.
Pour la digestion, après la meringue (mais que fait le comité gruérien contre la crème battue?), rien de tel qu’une boucle par la crête du Schwyberg, d’où l’on embrasse la Suisse romande jusqu’au Jura. Et ne marchez pas sur les pieds du fils: Markus s’occupe des trente-cinq Gusti (génisses). A 34 ans, ce menuisier lance la pierre (de 56 kg) à 4 m. 54. Il vient de gagner coup sur coup à Zurich et au Lac Noir. Amis du Sport-Toto, je parie que cette information vous avait échappé.

La bonne adresse
Bärghuus Gurli
Planfayon
Ouvert tous les jours, midi et soir de mai à fin octobre.
Tél. 026 419 19 13

Le vin qui va avec…
Un Vully pour un accord de proximité
Un Dézaley avec un L’Etivaz; un Vin jaune du Jura avec un vieux Comté. C’est ce qu’on appelle un accord de proximité. Plus proche que le Porto avec le Stilton, quoique l’image soit trompeuse, puisque ce sont les Anglais qui craquent pour ce vin muté. Sur les Préalpes singinoises, à mi-chemin, en diagonale, des lacs de Morat et de Thoune, on pourrait avoir le choix entre un vin du Vully (FR) ou de Spiez (BE). L’unité de lieu penche pour un pot de chasselas du Vully, à l’étiquette gothique. Celui d’Alexandre Schmutz et fils à Praz, en l’occurrence. Un vin «franc, loyal et marchand», qualité litre. Un blanc bien sec, parfait sur des mets rustiques et au fromage. Aujourd’hui, Sébastien, 32 ans, un des trois Romands à préparer une maîtrise de caviste, a rejoint l’entreprise familiale, partagée en un domaine de 4,5 hectares et des achats de raisin pour l’équivalent de 11 hectares. La carte de visite de la maison reste un chasselas issu d’une seule parcelle cadastrée, «L’Hôtel Richard», produit à 15'000 bouteilles et archétype du blanc du Vully comme on l’aime.

Chronique de Pierre Thomas, parue dans Le Matin-Dimanche, début juillet 2004.