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Posted on 10 mars 2012 in Vins italiens

Poggio di Sotto  sous pavillon Bertarelli

Poggio di Sotto
sous pavillon Bertarelli

L’automne dernier, Claudio Tipa, l’oncle d’Ernesto et de Donattela Bertarelli, a racheté Poggio di Sotto, beau domaine de Brunello di Montalcino. Rencontre sur place. A noter que les domaines de Claudio Tipa ont été nommés «Cave de l’année 2014» par le Guide Gamberosso.
Pierre Thomas, de retour de Montalcinosite_vuedepuispoggiosot.jpgSi, selon une formule consacrée, tout est à vendre dans le vignoble, il y a des régions plus convoitées que d’autres. «Il y a 12 ans, quand je me suis marié et que j’ai rejoint la famille Bertarelli, Ernesto me l’avait dit: il te faut un domaine emblématique pour tirer en avant les autres vins que tu veux faire.» Claudio Tipa, 64 ans (en photo ci-dessous), n’a pas écouté son neveu: «Il faut dire que dès que je me montrais à Montalcino, on me proposait des choses à un prix sans rapport avec la réalité.» Il lui a fallu cinq ans pour convaincre le propriétaire de Poggio di Sotto. L’automne dernier, ces 10 hectares, bien situé au sud-est de l’appellation de Montalcino, sont tombés dans l’escarcelle de Claudio Tipa, qui rejoint les Gaja, Allegrini et autres Illy, parmi les familles «étrangéres» devenues propriétaires à Montalcino.

Rien à changer au service du sangiovese

«Ici, il n’y a rien à améliorer. Le mot d’ordre est le respect total de la vigne et du sangiovese. Il n’y a aucune alchimie.». Le nouveau propriétaire le proclame avec une fierté décalée. Car cette continuité contraste singulièrement avec l’entrepreneur qu’il fut dans sa vie, et dans les autres propriétés de la famille Bertarelli, sur la côte toscane de la mer Thyrrhénienne. «A Montecuco, j’ai repris Collemassari en 2002, un millésime catastrophique. J’ai agrandi la propriété; aujourd’hui 1’400 hectares, dont 122 ha de vignes. Et j’ai bâti une cave imposante, car je ne crois pas aux extensions par pièces rapportées. Il m’a aussi fallu 5 ans pour acheter Grattamacco.» A Bolgheri, à côté de la Tenuta San Guido (Sassicaia), sur 12 ha, l’exercice a été poussé au plus haut niveau, avec un deuxième vin, étiqueté Bolgheri, et un troisième, Albarello, soit le mot italien pour des ceps taillés en gobelet.

Dans les règles de l’art

Rien de tout cela à Poggio di Sotto. La propriété n’a que vingt ans et les vignes ne produisent que 35 hl/ha, contre les 54,4 hl/ha autorisés. La cave est fonctionnelle: les fûts, en chêne de Slavonie, sont dix fois plus grands (3’000 litres) que des barriques, mais deux fois plus petits que les vases traditionnels à Montalcino. Leur forme ovale a été dessinée pour convenir au délicat sangiovese. Après un an d’élevage, 60% du vin donne un «rosso di Montalcino», élevé encore un an dans le bois, «en fait, un petit brunello», commente le maître des lieux. Les 40% restants seront élevés 4 ans en fûts pour le «grand vin», le brunello. Les années exceptionnelles, un an d’élevage sous bois supplémentaire, donne un riserva. Jusqu’en 2000, il n’y en eut que deux, en 1995 et en 1999. Depuis, à 500 m. d’altitude, le réchauffement climatique s’est aussi fait sentir: les bonnes années se sont succédé, 2004, 2005 et 2006.

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Une succession assurée en cave

La seule chose qui va changer, c’est l’œnologue. Par nécessité: Giulio Gambelli, surnommé «bicchierino» (petit verre), aussi conseiller de Case Basse (Soldera), légendaire brunello, et de Pergole Torte (Manetti), chianti 100% sangiovese, est décédé le 3 janvier 2012, à l’âge de 86 ans. Le jeune œnologue toscan Luca Marrone, en charge des autres vins de la famille Bertarelli, s’occupera de Poggio di Sotto. Le 2007, mis sur le marché ce printemps, confirme la finesse de ce grand vin, alliant charme et profondeur, aux goûts de cerises amarena et d’épices douces. Et 2011? «Je me suis demandé si je n’allais pas tomber, comme à Collemassari, sur le pire des millésimes… Mais il suffisait d’attendre pour vendanger. C’est toujours un pari difficile: dans le vin, il n’y a pas de marche arrière», sourit Claudio Tipa. Voilà qui rappelle Alinghi. Un défi toutes voiles dehors.

Paru dans Hôtel Revue du 8 mars 2012.

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