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Posted on 4 mars 2005 in Conso

Des blancs très décevants…

Des blancs très décevants…

Vins blancs bon marché en supermarché
Chèque en blanc pour défauts divers
Comment expliquer que le vin blanc suisse résiste bien sur les linéaires des grandes surfaces à la libéralisation des importations? Il suffit de goûter aux vins blancs étrangers pour comprendre le choix des consommateurs.
Six vins satisfaisants pour six insatisfaisants. Notre test est clair : si l’on veut sortir des chemins battus du chasselas suisse, et des chardonnays et sauvignons en tous genres, gare à l’embardée ! Pourtant, chaque grande surface propose une palette de blancs de toutes origines, à tout prix. Pour ce test, la moyenne est de 6,90 francs (prix cumulé divisé par douze), soit exactement le prix moyen des vins blancs étrangers vendus en bouteilles (lire l’éclairage, plus bas…).
Ni cépage, ni terroir
Le seul vin qui tire son épingle du jeu est un torrontès, cépage du pied des Andes argentines, qui rappelle le viognier ou la petite arvine. Pourtant, le consommateur ne saurait se fier au cépage. Pour la moitié des flacons de ce test, la variété de raisin n’apparaît pas sur l’étiquette, mais parfois sur la contre-étiquette (le parellada sur le Vina Sol) ou se cache derrière l’appellation (l’Orvieto Classico est un assemblage où le banal trebbiano est souvent majoritaire). Quant à la réputation des pinots gris italiens, elle est reléguée par un «cousin» hongrois. Encore faut-il lire son étiquette… en italien, de A à Z. Une étiquette licite, parce que dans une des langues officielles suisses, même si les Magyars, eux, ne parlent pas l’italien, mais cultivent le pinot gris sur les bords du lac Balaton depuis sept siècles ! Et le colombard ? Un raisin blanc à grand rendement, destiné à être distillé pour l’armagnac et le cognac…
Faut-il alors se rabattre sur le terroir et sa législation, DOC (dénomination d’origine contrôlée) ou IGT (indication géographique typique)? Hélas, sur les six moins bien classés du test, tous sont italiens et munis d’une telle garantie de provenance. Mais pas de qualité !
Du bouchon et du soufre
Cette Bérézina s’accompagne de deux constantes. D’abord, un mauvais bouchage des flacons : la capsule à vis s’avère un moindre mal, le synthétique aussi, meilleur que le liège colmaté, aggloméré ou 1 + 1 (du mauvais liège entre deux minces rondelles de «bon» liège). Sauf pour la capsule, un «détail» indécelable, pourtant trop souvent annonciateur de vins amers et secs.
Ensuite, une impression désagréable de vins soufrés. Tous sont dans les généreuses limites légales suisses (260 mg/litre de SO2 total pour les blancs et rosés secs, soit un bon quart de plus que pour les rouges). Comme l’explique le chimiste cantonal vaudois, Bernard Klein, «les vins de petite qualité sont davantage soufrés pour éviter tout problème œnologique». Au demeurant, rares sont les crus qui ne contiennent pas du tout de SO2, un antioxydant qu’on peut doser avec modération tout au long d’une vinification soignée.
Une précision de peu portée
Dès maintenant apparaît sur des bouteilles importées la mention, désormais obligatoire en Europe qui suit ainsi une prescription américaine, «contient des sulfites». Les vins suisses s’y mettront dès la vendange de cette année 2005. Toutefois, cette mise en garde ne signale pas la teneur exacte en SO2, et ne fait aucune différence entre des vins soufrés, peu ou prou. Un avis sans portée générale, sauf à l’attention des allergiques au SO2. Qui savent, par douloureuse expérience, que le vin leur est interdit, tout comme les fruits secs.
                                                                                                                  Pierre Thomas

Eclairage
Pourquoi les vins blancs suisses font de la résistance…

Les grandes surfaces (50% du marché suisse du vin) vendent peu de vin blanc étranger à bas prix. Selon l’Observatoire suisse du vin, entre  décembre 2003 et novembre 2004, 73% des vins blancs en bouteilles de la grande distribution étaient indigènes (au prix moyen de 6,87 fr. la bouteille). Sur la part étrangère de 27% (à 6,91 fr.), la France est en tête (7%), devant l’Italie (5%) et l’Espagne (1%).
Certains, pourtant, prédisaient que la libéralisation totale des importations, dès 2001 entraînerait l’effondrement de la consommation du vin blanc suisse… Les chiffres démentent cet alarmisme. Certes, en Suisse, la consommation générale du vin blanc a baissé, de 90 millions de litres en 2000 à 86 millions à fin juin 2003 (derniers chiffres officiels connus). Sur ce total, les vins blancs indigènes ont perdu 8 millions de litres, régressant de 65 millions à 57 millions.
«Les vins blancs étrangers ont progressé au détriment des vins suisses qui ont perdu 10% de part de marché. Sous cette pression, les viticulteurs suisses ont vu le produit brut par hectare planté en blanc chuter de 30 à 50% selon les régions», commente Pierre-Yves Felley, directeur de la Fédération suisse des vignerons et président de l’Observatoire suisse du vin.

Texte paru dans le magazine de consommateurs «Tout Compte Fait», en février 2005, avec un test de 12 vins blancs achetés en supermachés.