Pages Menu
Categories Menu

Posted on 6 juin 2005 in Adresses, Restos

Lausanne (VD) — L’esquisse

Lausanne (VD) — L’esquisse

L’esquisse, Fondation de l’Hermitage, Lausanne
Dessine-moi un resto

Les tables de musée sont à la mode. A Genève, la terrasse du Barocco, dans les murs du Musée d’Art et d’Histoire, est un des lieux les mieux fréquentés de la vieille ville. Mais on n’y sert de jolis plats d’inspiration moderne qu’à midi… L’annexe de la Fondation de l’Hermitage, à Lausanne, souffrait jusqu’ici de la même tare.
Une belle terrasse d’où l’on devine la cathédrale et le lac, des contreforts de Sauvabelin, qui n’est pas la moins inspirée des collines lausannoises, de grands arbres, un cadre de verdure… Tout pour plaire, y compris la cuisine de Nicolas Abegg. Voilà qui attirait bien du monde. Mais à midi seulement. Depuis quelques semaines, « L’esquisse » a forci le trait et pris des couleurs. Toujours l’incomparable terrasse, qui permet non seulement de déjeuner, mais aussi de dîner, qui plus est à la fraîche, à 630 m. d’altitude, dans un calme absolu, en fin de semaine. La réservation d’un des trente-six fauteuils est quasi-obligatoire… Pour les temps moins cléments, le bâtiment en briques rouges et tourelle s’est augmenté d’un cube en rouge et noir, qui prolonge la salle à banquette, longtemps tea-room à coupes Romanoff.
Un mariage mets-fruits
Voici donc une ébauche de restaurant devenue bonne table lausannoise à part entière. Le jeune chef aligne les plats avec régularité et originalité. Pour commencer, des rouleaux de printemps crus, retour d’Indochine ; un saumon mariné, moelleux, à l’aneth servi avec du fenouil découpé dans toute sa longueur, ou des lamelles de concombre, enroulées autour d’un fromage de chèvre frais. Des mises en bouche alléchantes, à petits prix (entre 12 et 14 fr.). Pour suivre, une ferme et succulente daurade à l’écrasée de pommes de terre parfumée au lait de coco et coriandre — mais juste ce qu’il faut ! — ; des noisettes d’agneau, à la cuisson parfaite, laquées au vinaigre balsamique et, audace, posées sur une mangue bien mûre, d’autant poivrée. Nicolas Abegg aime bien adjoindre des fruits à ses plats : la moutarde est aux «baies rouges», surmontées d’une framboise, pour accompagner un filet de bœuf vivement poêlé, tendre et goûteux, avec d’exquises pommes de terre nouvelles. Trois plats entre 24 et 30 francs. Ajoutez-y un dessert à 10 francs et vous obtenez un des meilleurs rapport qualité-prix de tout Lausanne. Servi en verre, le crumble associe papaye et citron-vert. Le fondant au chocolat aurait pu l’être plus (fondant, donc…). Et quant au croque-monsieur de banane, il respecte le modèle (une purée de fruit entre deux tranches de pain toasté), dans un genre non moins étouffe-bougre…
Des vins bien choisis
Service décontracté sous l’œil de la patronne, Camille, et carte des vins articulée autour de crus au verre et de flacons à des prix bien compris (un Clos Floridène rouge de Denis Dubourdieu à 40 francs). Et même un vin «de la Sallaz» (sic — lire ci-contre). En attendant la «cuvée Tridel» de pourriture noble (du nom de l’usine d’incinération qui se construit au fond du vallon du Flon, derrière le rideau d’arbres…) ?

La bonne adresse
L’esquisse, café-restaurant de l’Hermitage
2, rte du Signal, Lausanne
tél. 021 320 50 07
Ouvert tous les jours, sauf le lundi, de 9 h. à 18 h. Jusqu’à minuit, jeudi, vendredi et samedi.

Le vin qui va avec…
Un pinot de famille

Faussement classé «pinot noir de La Sallaz», le Clos du Mauremont, vient de La Sarraz. Le plus petit domaine vaudois (appellation non contrôlée) a une bien jolie histoire. Ces 3000 m2 ont été plantés il y a vingt ans par l’ancien professeur et médecin-chef de l’Hôpital de Saint-Loup, Emile Bonard, sur un coteau non loin du Château d’Eclépens. «J’ai appris à tailler et à ébourgeonner», explique le propriétaire, octogénaire, qui a pris sa «deuxième retraite» et a confié le soin de ces quelques ceps au vigneron du Château. La vinification est suivie par l’œnologue John Pernet, au Clos du Roussillon, à Tartegnin. Un «vin de garage» vaudois, ou plutôt de «capite», ces cabanes typiques du vignoble, dessinée ici par Jacques Longchamp, un des architectes du CHUV. La commercialisation se fait par l’intermédiaire du commerçant en vins Claude Berthaudin, à Genève, neveu d’Emile Bonard. Ce pur pinot noir, planté sur une mollasse si filtrante que les ceps ont quasiment séchés en 2003 (et ont eu de la peine à se reprendre en 2004), garde un air de famille avec un bourgogne de la côte châlonnaise, frais, vif et si agréable sur une terrasse…

Paru dans Le Matin-Dimanche du 5 juin 2005.