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Posted on 31 décembre 2006 in Adresses, Restos

Lausanne-Lutry (VD) — Restaurant japonais Ko-An

Lausanne-Lutry (VD) — Restaurant japonais Ko-An

Restaurant japonais Ko-an, Lutry (VD)
Derniers sushis de l’an
En 2007, ouvrez un bar à sushis! Comme le Lausanne-Palace qui a mis un projet à l’enquête. Prenez la route du lac, de Sushi — pardon d’Ouchy — à l’Orient. Des Chinois ont ouvert le Bambou, pub à l’allure coloniale, avec bar à sushis, ma foi, pas mauvais, surtout ceux au poireau — «remake» à cru du papet vaudois. Plus loin, le Vieux-Moulin a été repris par une patronne coréenne, anglophone. On y a dégusté une tempura de filet de perche, sauce soja, sur la terrasse du bar, face au Lake of Geneva par grosse bise. Exquis dépaysement! Et entre deux, il y avait l’Ikoï No To, la Tour du Repos à Lutry, partie en volutes de fumée le 11 septembre 2005…
Une adresse historique
Descendant d’une famille de Vaudois hôteliers, restaurateurs et voyageurs, de Villars-Bretaye à l’Asie du Sud-Est, Xavier Noverraz, 51 ans, a trouvé à se reloger au premier étage de La Lagune, à l’entrée de Lutry. Une grande salle à manger peinte d’un ciel bleu pastel aux nuages blancs et une galerie donnant sur le port. L’adresse est un vestige de l’art culinaire de l’Empire du Soleil Levant en Romandie : «Quand j’ai ouvert mon restaurant japonais en 1988, il y en avait trois ou quatre à Genève et rien jusqu’à Berne ou Zurich.» Aujourd’hui, on ne les compte plus, du take-away parfois bon, au plus select, dont l’excellent Kazumi à Corcelles-Cormondrèche (NE), un cuisinier qui fut un des premiers chefs de… Noverraz ! Car le Vaudois est assez fier de n’avoir «usé» que quatre pros en vingt ans. Toujours, ils viennent du Japon. Comme aux meilleurs jours de la Tour du Repos, avant un autre 11 septembre (2001, celui-là), ils sont deux, Toru Arakawa, rejoint depuis peu par Toshio Tojima.
Sushis et sashimis en veux-tu en voilà
Même si la carte offre d’autres plats (menu surprise à 75 fr.), ce sont bel et bien les sushis, tempura et autres sashimis qui représentent deux tiers des commandes. Le service, conduit par Gaëtane Tinchon, est spectaculaire : les mets sont amenés sur la table dans des bateaux, pour deux convives (110 fr., sushis seulement ; avec sashimi, 125 fr., et tempura en plus, 138 fr.). Reprenons… Les sushis sont des boulettes de riz recouvertes de poissons, cuits ou crus. Des variations peuvent les entourer d’algues (minuscule, mais excellent, rouleau de maquereau), et comporter, à la californienne, de l’œuf et de l’avocat.
Les sashimis sont l’illustration qu’on ne peut pas tricher avec les ingrédients : les poissons, servis crus, doivent être frais de chez frais (ici, de chez Mulhaupt, le grossiste vaudois présent sur les grandes tables romandes). Thon rouge, loup (de mer, pas du Valais !), dorade ou saumon «dé-stressé» de Norvège, qui passe de vie à trépas dans l’eau glacée, sous un rayon laser, et même huîtres avec une tonique sauce piquante. Sinon, on fait son petit ménage en mélangeant la sauce soja et le wasabi (pâte de raifort vert…fort !). Quant à la tempura, c’est une friture à base de farine mousseuse, toute de légèreté, exécutée ici par Ruiz Gomes, un Portugais qui, depuis 18 ans, applique la recette apportée au Japon par les Ibériques lors des Grandes Découvertes.
Authentique nippon? Bientôt un label!
Il faudrait encore parler des trois bières aromatiques que Xavier Noverraz brasse lui-même, des desserts, bons et variés (glace ou sorbets au thé vert, aux haricots rouges, au saké), des sakés bus en godet carré en bois hinoki, des céramiques, pratiques ou décoratives, de l’atelier Takeuchi à Penthalaz (VD). Et ajouter que le ministère japonais de l’agriculture veut délivrer aux restaurants japonais un «label d’authenticité». Ils seraient 25'000 dans le monde, un chiffre destiné à doubler en trois ans! Rares sont les tables dignes d’être élues: à Paris, un organisme japonais en a retenu une cinquantaine sur plus de six cents adresses. Ca ne vous rappelle rien? Un ministre berlusconien voulait attribuer le label «spécialité traditionnelle garantie» aux pizzas à la napolitaine, cuites au feu de bois. C’était il y a deux ans et demi et, à notre connaissance, plus personne n’en parle… La mode du label risque de passer plus vite que celle des sushis.

La bonne adresse
Restaurant japonais Ko-An
Rte d’Ouchy 15
Lutry
Tél. 021 791 16 43
www.ko-an.ch
Fermé le dimanche et le lundi

Le vin tiré de sa cave…
Trop rare viognier
Avec ce dernier jour de 2006, l’Association viticole de Lutry (www.avl.ch) tourne la page de son centenaire. A la tête de cette coopérative d’une septantaine de propriétaires de vignes, un tandem atypique. Le président est médecin, mais le Dr Jean-Charles Estoppey travaille deux jours par semaine dans ses vignes. Et il tient un discours modéré sur le 0,5 pour mille, qui peut le faire passer pour un extrémiste anti-prohibition. Quant à l’œnologue de la maison, fait rarissime en Pays de Vaud, elle est une femme, Laurence Keller. De là à dire que son viognier 2005 est élégamment féminin peut apparaître douteux, quand on sait qu’un quotidien étatsunien a qualifié le viognier de cépage «le plus sexy». Pas sûr, non plus, que la barrique (durant neuf mois) amène grand’chose à ce blanc frais: elle masque son nez, tandis que la bouche est explosive, aux arômes de pêche blanche et d’abricot, avec une finale acidulé. Un vin bien bâti pour affronter les goûts exotiques. Et un exemple rare : il y a 440 fois moins (!) de viognier que de chasselas dans le vignoble vaudois; Lavaux totalise 1,4 ha des 5,5 ha recensés, dont les quatre-cinquièmes sur Lutry-Villette. Goutte d’or dans le Léman…

Chronique parue dans Le Matin-Dimanche du 31 décembre 2006.