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Posted on 3 octobre 2020 in Vins suisses

La diolle reste expérimentale et confidentielle

La diolle reste expérimentale et confidentielle

Pour le généticien José Vouillamoz et le vigneron de Chamoson Didier Joris, qui la cultivent, la «diolle» qu’ils ont «ressuscitée» en Valais, reste une chasse gardée. Mais, vu ses qualités historiques et organoleptiques, elle devrait se (re)développer. Le Sierrois Nicolas Zufferey en a notamment planté.

Par Pierre Thomas

Elle reste, pour l’heure, une rareté réservée à ceux qui l’ont sauvée. Enfant naturel de la rèze (déjà citée dans un fameux document anniviard de 1313) et d’un cépage inconnu, la diolle avait été mentionnée dès 1654, puis référencée par le fameux ampélographe Adrien Berget, au début du vingtième siècle.

Mais on perd la trace de ce cépage blanc authentiquement valaisan jusqu’en 2007, où feu Germain Héritier, de Savièse, la signale à Changins (qui l’a dans sa collection de Pully-Caudoz). Quand José Vouillamoz lance un appel à la reconnaissance par l’ADN de tout cépage suisse dispersé dans le vignoble, le même Saviésan lui montre ses deux derniers pieds de diolle, dans un mur. Le généticien la replante en 2013 à Chamoson. Mais le vieux cépage ne s’adapte pas au porte-greffe choisi… Il faut donc recommencer l’exercice en 2015.

En 2016, elle donne 8 kilos de raisin. 2017 est son premier millésime «officiel», puis le 2018 (tirée à 134 flacons) et le 2019 (100 bouteilles) récemment présenté chez Didier Joris qui, cette année, réalise sa 45ème vendange ! Dans un coffret laqué de blanc, accompagnée de deux bandes dessinées qui racontent son histoire, la bouteille de diolle 2019 vaut 130 fr.

Une rareté mondiale

Une paille pour une rareté valaisanne, donc mondiale ! Sa vinification est particulière : elle se déroule en dame-jeanne, récipient en verre récupéré par Didier Joris (et qui a dû contenir du marc…), et le flacon est obturé par une capsule à vis, dont José Vouillamoz, devenu sous-directeur du club DIVO, est un ardent défenseur. «C’est le vin suisse en capsule le plus cher !» Le raisin blanc à peau épaisse ne connaît donc ni bois, ni liège.

A l’évolution, le vin se situe entre le païen et la petite arvine, assure le vinificateur. Pour la 2019, titrant 104° Oechslé, il a fallu trier le raisin, victime de la grêle. Une macération pelliculaire a précédé la fermentation, spontanée, et il n’y a eu qu’un seul soutirage… Au nez, cette diolle est délicatement citronnée, avec de fines notes d’orange, en bouche, puissante, grasse, avec une pointe de salinité finale qui la rapproche de la petite arvine, davantage que ses notes d’agrumes. «Elle monte en puissance, plutôt que de filer…» image Didier Joris et sa persistance aromatique est remarquable. Au point qu’on la verrait volontiers croître et se multiplier en Valais… Les deux compères ont fait passer la surface de 300 à 566 m2 en 2019. Et en 2020, un acte de vandalisme a piétiné une centaine de pieds…

Au verso de l’étiquette, le profil des deux «sauveurs» de la idole…

«On serait heureux que d’autres producteurs s’y intéressent», confie José Vouillamoz. Mais la diolle ne figure pas (encore ?) dans la liste des cépages autorisés en Valais (et en Suisse…). Elle reste une affaire «expérimentale» et son nectar est étiqueté «vin de table». Mais Nicolas Zufferey, à Sierre, en a toutefois planté 200 pieds. Première récolte en 2020 ! On va bientôt pouvoir organiser un «mondial de la diolle»

Cet article est aussi paru sur le blog les5duvin.

©thomasvino.ch