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Posted on 13 avril 2007 in Adresses, Restos

Cully (VD) — Restaurant de la Gare

Cully (VD) — Restaurant de la Gare

Restaurant La Gare à Cully (VD)
Un buffet dans ses murs
Face à la gare de Cully, dissimulé derrière un jardin à l’ombre d’un magnifique pin qui appelle l’été, l’ex-buffet se tapit discret. Mais Jean-Luc Vermorel sait ce qu’il se veut. Il vient d’en racheter les murs. En semaine, à midi, on se presse dans le bistrot pour les cinq assiettes du jour, changées sur la semaine, et, en permanence, des filets de perches. «A ce prix, 18 francs, ils ne viennent pas du Léman, évidemment», signale le patron. A l’arrière, une salle-véranda (non fumeur !) au charme certain, avec ses vitraux signés Margairaz de la Belle Epoque, qui dessinent des grappes de raisins dorés. Plantes vertes, anturium sur chaque table, banquette et coussins multicolores : on sent la main d’une femme dans ce décor. Géraldine Vermorel est au service, aidée par un sommelier.
La patte du pâtissier
Si le décor n’a guère changé depuis des lustres — mais des travaux sont programmés d’ici l’automne —, on est loin de la pinte vaudoise. En sept ans, le chef, d’origine française, a assis une jolie réputation. Il sait doser le classique et le moderne, avec une précision héritée de son apprentissage de pâtissier. L’amuse-gueule donne le ton : une mousse de foie de volaille et une purée de pommes de terre rattes émulsionnée. Suivent, puisés dans deux des quatre menus, qui reprennent les plats de la carte — en portion et prix adaptés ! — une riche salade de dents-de-lion (du menu de saison, à 69 fr.) et un duo de saint-jacques et escalope de foie gras, sur une fraîche salade (menu tentation, à 89 fr.).
Sur une vaisselle originale — des carrés de verre —, des éléments comme une violette sur une lichette de mascarpone, un trait de coulis de betterave rouge ou une tuile de sésame.
Un an pâtissier chez les frères Troisgros, à Roanne, où son frère est toujours sommelier, puis au Lausanne-Palace, Jean-Luc Vermorel emprunte beaucoup à son métier de base. Et il le dit sans complexe, ce qui rapproche la cuisine de la pâtisserie, «c’est la décoration!». Ca va du «c’est joliment présenté», exclamation de la table voisine, à l’écume de carottes sur un excellent filet de bar dans une sauce à l’huile d’olive vierge, dissimulée sous quelques feuilles de roquette, où l’œil est aussi satisfait que les papilles. Un filet de canette, dans une sauce, réduite, à la mélasse stimulée au jus de grenadine, suit, en parallèle d’un agneau servi dans une tajine de porcelaine. Un plat mijoté, tendre, aux pignons et épices orientales, comme la menthe et la cardamome.
Barbe-à-papa et vieux millésimes
Là encore, l’opposition sucré-salé joue sur l’alternance, mais les goûts sont bien maîtrisés, jusqu’à l’apothéose du dessert et de sa barbe-à-papa, sucre à haute dose, où la forme l’emporte sur le fond… Reste que le crumble à l’ananas et les trois crèmes brûlées à l’orange, à la pistache et à la fève de tonka, sont délicieux.
Aidé par un second et deux apprentis, l’ex-pâtissier «fait le chaud». Avec une prédilection jamais démentie pour le foie gras, dont la clientèle raffole… Une belle carte des vins — le patron avoue être «un passionné» — n’hésite pas à proposer des flacons d’anthologie, tant en «vieux Dézaleys» qu’en étiquettes prestigieuses. Mais il y a aussi des trouvailles à puiser, avec l’aide du sommelier. Ce «buffet» se fait une place de choix; voilà le couple Vermorel dans ses meubles et donc en selle pour durer.

La bonne adresse
Restaurant La Gare
Place de la Gare 2
Cully
Tél. 021 799 21 24
Fermé le samedi à midi et le dimanche
www.lagarecully.ch

Le vin tiré de sa cave…
Fer contre terre
S’il y a un vigneron qui incarne le Dézaley, c’est bien Luc Massy, 55 ans, d’Epesses, chef de file de la Baronnie. Jusqu’en 2004, et la reprise des vignes de la famille de son cousin (Claude, ancien conseiller national), il n’avait pratiquement pas de rouge. Avec un hectare et demi de plus (soit 8,5 au total), le voilà prêt à proposer une bouteille de Dézaley rouge (www.massy-vins.ch). Le mimétisme est parfait : sur l’étiquette, avec la même graphie, le Chemin de Fer est devenu de Terre. Premier millésime, ce 2004. Année difficile : 40% de pinot noir, autant de gamay, et du merlot, du cabernet-sauvignon, de la syrah et de l’ancelotta, tous récoltés et cuvés pêle-mêle, puis passés dix-huit mois en barriques. Cela donne un peu l’image d’une élégante en robe écarlate, sabots aux pieds. Pour 2005 et 2006, le vigneron a changé son fusil d’épaule : les raisins ont été cueillis séparément, cuvés dans des tonneaux tenus debout de 400 litres, puis pressés, avant d’être remis dans le même bois pour l’élevage. Résultat : «Un vin un peu moins boisé», témoigne Luc Massy. Et ça reste rare : pas plus de 3'000 bouteilles, soit dix fois moins que le chasselas du même grand cru. Pot de fer contre pot de terre!

Chronique parue dans Le Matin-Dimanche du 15 avril 2007.