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Posted on 27 juin 2013 in Vins suisses

Arte Vitis a fêté son dixième millésime

Arte Vitis a fêté son dixième millésime

Autoproclamé élite des vignerons vaudois, Arte Vitis, qui est un groupe informel, sans statuts, a fêté, début juin, son dixième millésime en grande pompe, au Lausanne-Palace & Spa. Mot d’ordre de ces deux journées: ouverture!

Par Pierre Thomas

C’est Blaise Duboux, président d’Arte Vitis depuis la fondation, il y a onze ans, qui le dit : «On a été déçus en bien». Le pari d’inviter, contre un substantiel droit de bouchon, les Lausannois et les Vaudois à venir déguster des vins lors de deux ateliers, un dimanche et un lundi, et, le dimanche soir, à un «show cooking», animé par les chefs vaudois les plus toqués, n’était pas gagné d’avance. Tant les ateliers que le repas ont fait le plein, attirant près de 400 personnes. Le vigneron d’Epesses se réjouit que l’«esprit d’ouverture» d’Arte Vitis ait été clairement perçu.

Le pinot noir des Grisons en vedette

Pour fêter leur dixième millésime, les Vaudois avaient invité douze vignerons des Grisons, unis sous le sigle de Vinotiv. Eux aussi sont l’élite cooptée de la Bünder Herrschaft. S’ils cultivent tous plusieurs cépages, c’est le pinot noir qui les réunit. Chaque année, ils mettent sur le marché 144 caisses du dernier millésime de pinot noir, élevé en barriques. Les premières années, avant qu’ils en acceptent un treizième, les 12 membres fondateurs d’Arte Vitis avaient aussi lancé une telle caisse «collector». Puis, le treizième arrivé, ils en ont abandonné l’idée… «La mise en caisse a lieu en commun et chacun repart avec ses 12 caisses», explique Martin Donatsch, de Malans, ravi de l’accueil lausannois : «J’ai eu plusieurs dégustateurs qui sont venus vers moi en disant, les vins vaudois, on les connaît, mais pas vos pinots…» Rien de vexatoire: Vinotiv rendra la pareille aux Vaudois, sans doute à Bad Ragaz, l’an prochain. Tous se retrouveront à Mémoire & Friends à Zurich à fin août (cette année, le lundi 26 août, 11 h. – 19 h.). Et les uns et les autres, pour la plupart, se côtoie à la Mémoire des vins suisses (lire ci-dessous).

La Suisse alémanique en point de mire

Selon Blaise Duboux, les meilleurs Tessinois devraient être invités à l’avenir, pour de nouveaux échanges. Et pourquoi pas les Toqués des Dentelles (de Montmirail), une amicale de vignerons des Côtes-du-Rhône sudistes qui avaient, à l’époque, inspiré Louis-Philippe Bovard pour lancer Arte Vitis. Le mouvement n’est toujours pas structuré en association, même si le sujet est à l’étude. Les treize membres se voient quatre fois par an pour discuter de thèmes divers et échanger des impressions. «On a réussi à franchir les barrières régionales vaudoises et on se parle tous franchement. Personne n’a peur de l’autre !», explique Henri Chollet. Dans le canton de Vaud, où l’esprit de clocher est légendaire, ça n’est pas rien…

Les membres restent toutefois très libres. Ainsi, lancée le jour d’ouverture d’Arvinis à Morges, la bouteille Arte Vitis a convaincu le Domaine Cruchon, qui embouteille toute sa gamme dans ce nouveau contenant, dessiné par Vetropack et inspiré d’une bouteille exposée au Musée de la vigne du Château d’Aigle, et quelques autres, dont les Chollet, du Domaine Mermetus et le Domaine de Marcelin. Mais le nouveau flacon n’a pas été imposé comme signe de ralliement à tous les vins qui se réclament d’Arte Vitis (quelque 150 étiquettes au total). Le mouvement espère aussi une présence régulière en Suisse alémanique, où il avait été lancé à l’Ermitage am See, à Küssnacht, tenu à l’époque par un certain Edgard Bovier, le chef actuel du Lausanne-Palace & Spa. Une boucle s’est bouclée!

Sur cette photo, qui date un peu, on reconnaît, de g. à dr., Heni Chollet, Jean-François Neyroud-Fonjallaz, Louis-Philippe Bovard (assis, lunettes), Pierre Monachon, Rodrigo Banto, Raymond Paccot (assis, le coude sous le menton), Raoul Cruchon (juste derrière), Pierre-Luc Leyvraz, Christian Dugon (chemis bleue), Charles Rolaz (chemise grise), Philippe Gex (assis), Philippe Charrière (ancien régisseur du Domaine de Marcelin) et, appuyé à l’arbre, Blaise Duboux, président d’Arte Vitis dès le départ, en 2002.

Sur cette photo, qui date un peu, on reconnaît, de g. à dr., Heni Chollet, Jean-François Neyroud-Fonjallaz, Louis-Philippe Bovard (assis, lunettes), Pierre Monachon, Rodrigo Banto, Raymond Paccot (assis, le coude sous le menton), Raoul Cruchon (juste derrière), Pierre-Luc Leyvraz, Christian Dugon (chemis bleue), Charles Rolaz (chemise grise), Philippe Gex (assis), Philippe Charrière (ancien régisseur du Domaine de Marcelin) et, appuyé à l’arbre, Blaise Duboux, président d’Arte Vitis dès le départ, en 2002.

Les 13 apôtres d’Arte Vitis

1) Domaine Louis Bovard, Cully (16 ha). Louis-Philippe Bovard est le père-fondateur de presque toutes les innovations du vignoble vaudois de ces vingt dernières années. La cave vient de changer d’œnologue : à Philippe Meyer, nommé œnologue cantonal vaudois fin 2012, a succédé Caspar Eugster, fort d’une longue expérience vitivinicole dans les domaines du groupe Hess. Le Dézaley Grand Cru La Médinette fait partie de la Mémoire des vins suisses.

2) Henri et Vincent Chollet, Domaine Mermetus, Villette (5 ha). A Henri, esprit inventif de Lavaux, quasi-valaisan dans son approche multicépages, succède Vincent qui devrait, cet automne, rentrer ses raisins dans une cave toute neuve. Le Vin des Bacounis, une mondeuse noire, fait partie de la Mémoire des vins suisses.

3) Domaine La Colombe, Raymond Paccot, Féchy (15 ha). Grand défenseur du chasselas de La Côte, mais aussi de la biodynamie, avec des parcelles complantées (comme l’a fait Jean-Michel Deiss en Alsace) pour son blanc en amphores, Curzilles, Raymond Paccot est depuis peu secrétaire de l’Académie internationale du vin, à Genève. Son meilleur chasselas, Le Brez, fait partie de la Mémoire des vins suisses.

4) Caves Cidis, Tolochenaz. Chez Uvavins (coopérative de 460 ha), Philippe Corthay, grand professionnel à l’affût de toutes les évolutions de l’œnologie moderne, a succédé Rodrigo Banto, qui, après une dizaine d’années d’expérience au Chili, a rejoint sa patrie d’origine il y a onze ans. Le jeune œnologue signe des vins régulièrement médaillés dans les grands concours internationaux, du doral au merlot.

5) Henri Cruchon, Echichens (36 ha). Michel à la vigne, Raoul à la cave, avec sa fille Catherine, incarnent le renouveau du vignoble vaudois, dans toutes ses dimensions, orientées vers des vin «nature» (avec l’aide de la biodynamie). Leur pinot noir Raissenaz fait partie de la Mémoire des vins suisses.

6) Blaise Duboux, Epesses (5 ha). Président d’Arte Vitis depuis 11 ans, Blaise Duboux élève des vins originaux, comme ses blancs — qui ont retenu l’intérêt de David Schildknecht, bras droit de Robert Parker au Wine Advocate —, Dézaley, Calamin, inscrit à la Mémoire des vins suisses, et un Plant-Robert. Depuis cette année, président de la Communauté des vins de Lavaux.

7) Christian Dugon, Bofflens (5 ha). Ce producteur discret a fait sortir les Côtes-de-l’Orbe de l’anonymat, notamment avec des rouges d’excellent potentiel, et des blancs originaux.

8) Pierre-Luc Leyvraz, Chexbres (3,3 ha). Les dégustateurs aguerris de Lavaux n’ont pas attendu le verdict louangeur de David Schildknecht, publié au début 2013, pour placer son Saint-Saphorin Les Blassinges parmi les meilleurs chasselas du monde.

9) Domaine de Marcelin, Morges (7,5 ha). A Philippe Charrière, qui a achevé une carrière de régisseur-caviste curieux de tout, dans ce domaine expérimental de l’Ecolle vaudoise d’agriculture et de viticulture, a succédé le jeune Lionel Widmer, qui incarne, avec Vincent Chollet et Catherine Cruchon déjà l’avenir d’Arte Vitis.

10) Pierre Monachon, Rivaz (3 ha). Le président du label Terravin et syndic de son village est un des défenseurs les plus stricts du chasselas, mais signe aussi des rouges intéressants (merlot, mara). Son fils Basile, diplômé de Changins, poursuivra sur la lancée. Le Saint-Saphorin Les Manchettes fait partie de la Mémoire des vins suisses.

11) Jean-François Neyroud-Fonjallaz, Chardonne (7,2 ha). Souvent désignés par la sélection vaudoise, les chasselas de ce domaine familial sont parmi les plus intéressants de Lavaux.

12) Domaine de la Pierre Latine, Yvorne (10 ha). Ancien gouverneur de la Confrérie du Guillon, syndic de son village, Philippe Gex est un incontournable du monde vitivinicole vaudois. Avec son œnologue Bernard Cavé, qui signe ses vins, il a racheté le Clos du Crosex Grillé, à Aigle, dont le blanc Cuvée des Immortels, élaboré en amphores, fait partie de la Mémoire des vins suisses.

13) Domaines Hammel, Rolle. Après plus de vingt ans de collaboration étroite, l’œnologue Fabio Penta a décidé de rejoindre l’entreprise Œnologie à façon, à Perroy, cet été. Charles Rolaz reste donc en solo à la tête de la maison et des Domaines Hammel (30 ha), qui portent haut les exigences de qualité, tant en chasselas qu’en rouge. La Cuvée Charles-Auguste a été admise à la Mémoire des vins suisses, dont Charles Rolaz est le président, comme il l’est aussi de la commission des 1ers Grands Crus vaudois. Il est le seul à avoir été admis à Arte Vitis après la fondation.

Version longue du papier paru dans Hôtellerie & Gastronomie Hebdo du 27 juin 2013.