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Posted on 29 novembre 2008 in Tendance

Les cépages, étalons de concours?

Les cépages, étalons de concours?

Chardonnay, Pinot noir, Syrah, Merlot and Co
Le cépage, étalon de concours ?
Le palmarès du premier Mondial du Merlot, disputé à Lugano, vient d’être publié. Après les concours régionaux, nationaux et internationaux généralistes, les concours liés à un seul cépage ont la cote.
Par Pierre Thomas
Longtemps, les concours généralistes suffisaient au bonheur des thuriféraires de médailles : Concours mondial de Bruxelles, Vinalies de Paris, Vinitaly à Vérone, pour les plus courus. Puis sont arrivés les concours réservés à un seul cépage, Chardonnays du Monde, dans le Mâconnais, Mondial du Pinot Noir à Sierre, Muscats du monde à Rivesaltes, Syrah du Monde à Tain-l’Ermitage. Certains se concentrent sur un vin particulier, Effervescents du Monde à Dijon ou Mondial du Rosé à Cannes. D’autres encore ciblent des cépages moins internationaux, comme le riesling et le pinot gris à Strasbourg, les barberas à Alessandria, ou le tempranillo, cher aux œnologues espagnols, qui en ont fait un concours-promotion délocalisé. Des concours, comme le prochain à Thessalonique, en mars, joignent l’utile d’ouvrir le marché aux meilleurs vins étrangers et l’opportunité de montrer à des jurés internationaux les progrès des vins grecs locaux. C’est aussi ce double ressort qui sous-entend les Merlots du Monde au Tessin.
Déguster, c’est (toujours) comparer
Jugés sur la base d’une grille étalonnée sur 100 points, mise au point par l’Organisation internationale de la vigne et du vin à Paris (OIV), ces concours revendiquent rigueur et objectivité, garanties par la dégustation à l’aveugle des vins, servis et évalués l’un après l’autre.
Il reste toujours une part d’incertitude quant à la formation des séries: ni un tirage au sort dirigé (avec des têtes de séries), ni une dégustation en ordre aléatoire ne permet de garantir qu’un vin ne sera pas comparé, même inconsciemment, au précédent. L’idéal serait que chaque dégustateur prenne le vin dans un ordre différent : bonjour l’organisation ! Mais l’ignorance du cépage et de la région de production doit contribuer à libérer le dégustateur de toute influence et lui permettre de «juger le vin pour ce qu’il est». Voilà pourquoi les organisateurs insistent sur la diversité avérée des vins jugés, même rattachés à un seul cépage. Car au moment où les scientifiques insistent sur la notion de terroir, il peut paraître déplacé, pour ne pas dire incongru, de comparer des vins d’abord selon le critère du cépage.
Le cépage contre le terroir
Pour sa première édition, à l’Hôtel Villa Principe Leopoldo de Lugano, le Mondial du Merlot a drainé 12% d’échantillons de France. Pourtant, le merlot est le premier cépage de l’Hexagone, avec 100'000 hectares, dont la moitié dans le seul Bordelais. Au total, les surfaces plantées en merlot dans le monde avoisinent les 200'000 hectares, ce qui en fait le principal cépage rouge. A Lugano, sur les 278 vins, 62% provenaient de 23 pays, en plus de la Suisse, qui décroche à elle seule 58% des médailles d’or (pour 38,5% des vins présentés). La loi de la proximité a contribué à ce brillant résultat : les merlots tessinois (860 ha) étaient 55 en compétition et ont obtenu 6 médailles d’or (contre 56 vins italiens et 3 médailles d’or).
Trop de concours?
Les concours ne reflètent, par principe, que le niveau des participants. Pour le Tessin, on s’étonne de ne pas voir au palmarès les vins de Brivio et Gialdi, régulièrement cités au niveau national : au récent Grand Prix du Vin Suisse, à Zurich, le Sassi Grossi 2005 a été sacré meilleur merlot du pays. (Lire aussi les résultats du Grand Jury de 24 Heures) Réponse de Feliciano Gialdi : «Nous n’avons pas participé à ce concours. Après m’être battu pendant trente ans pour faire du Merlot del Ticino un vin de haut de gamme, je ne pense pas que ce soit une bonne idée d’accueillir à Lugano un concours ouvert à tous les merlots du monde. Et puis, sur dix jours, il y avait Expovina, à Zurich, qui met en avant son propre concours où pleuvent les médailles, le Grand Prix du Vin Suisse et ce Mondial du Merlot. Comment voulez-vous que le consommateur s’y retrouve entre toutes ces médailles d’or? J’envisage de renoncer, dès l’an prochain, à tout concours. Parce qu’à chaque fois, c’est aussi le producteur qui doit payer, et toujours plus cher, pour participer, en plus des flacons qu’il doit mettre à disposition gratuitement.»
Vieille rengaine: il y a trop de concours. Dans les eaux-de-vie, il y a trois concours en Suisse. Et leurs organisateurs, aux intérêts pourtant opposés, étudient la question d’en organiser plus qu’un. D’une part, parce que les participants s’essoufflent et, d’autre part, pour une question de crédibilité.

En perspective
Mondial du Merlot : un riche palmarès
En plus de 19 médailles d’or, ce premier concours a décerné six prix spéciaux et sept prix par nation ayant au moins une médaille d’or. Le meilleur vin du concours est californien, un merlot 2005, Hahn Estate, à Monterey. Le meilleur merlot suisse est tessinois, le SanZeno Costamagna 2007, de Claudio Tamborini. La meilleure cave du concours est valaisanne, de Gilbert Devayes, de Leytron, avec deux merlots en or, 2005 et 2006. La plus belle unanimité de jugement a salué le merlot Riserva 2006 de la Tenimenta dell’Oer, de Meinrad Perler. Et la seule médaille d’or française va à Synthèse 2007, un Vin de Pays d’Oc, du Domaine de L’Arjolle, à Pouzolles.

Résultats sur
www.mondialdumerlot.com