Pages Menu
Categories Menu

Posted on 11 mars 2009 in Vins européens

Grèce— Les cépages autochtones plébiscités

Grèce— Les cépages autochtones plébiscités

Le défi des nouveaux vins grecs
Les Grecs plébiscitent
l'autochtone

Internationaux ou autochtones, les cépages des vins grecs? Les seconds ont le vent en poupe. Reportage en Macédoine, la Grèce du nord.
Par Pierre Thomas,
de retour de Thessalonique

Avec une surface plantée en variétés de cuve six fois plus élevée que la Suisse (80'000 ha), la Grèce ne produit que trois fois et demie la récolte helvétique (350 millions de litres). «La révolution du vin grec est née ici, au nord, à la fin des années 1980. On n’y cultive que 20% de la surface totale, mais il y a davantage de nouveaux domaines, sur les 530 producteurs que compte la Grèce, qu’au sud, où les négociants et les coopératives dominent», explique le professeur Stefanos Koundouras, de l’Université de Thessalonique. Autour de la deuxième ville de Grèce (après Athènes, évidemment !) rayonnent huit «routes touristiques du vin» : jusqu’au pied du Mont Olympe au sud, vers Naoussa, la région du rouge qui a le vent en poupe, le xinomavro (650 hectares), à l’est, sur les pas de Dionysos, le dieu grec du vin, où encore en Chalcidique et ses trois «doigts» enfoncés dans la mer Egée.
Planter des cépages locaux

Après la plantation de cépages internationaux, chardonnay, sauvignon, viognier en blanc, et merlot, cabernet, syrah, en rouge, les producteurs grecs se tournent de plus en plus vers des variétés locales. «On a mis du temps à établir le style de vin adapté à chaque cépage», reconnaît Yannis Voyatzis, l’œnologue en chef des grands domaines Boutari (40% à l’export, soit deux fois plus que la moyenne grecque). « Il s’agit moins de sauvegarder le patrimoine grec que de faire des vins que le consommateur aime et achète. Il est incontestable que le xinomavro est un grand cépage rouge d’avenir. Et si Boutari produit 60% de blanc, nous sommes réputés surtout pour nos rouges de Naoussa, où la famille élabore du vin depuis 1889», explique dans un français parfait le directeur technique depuis un quart de siècle.
Dans un autre domaine pionnier, Porto Carras (475 ha), fier d’avoir produit «le premier cabernet sauvignon de Grèce» conseillé par feu le professeur bordelais Emile Peynaud, la jeune œnologue Dyonisia Samara, rétorque : «Le xinomavro est un cépage difficile, destinés aux œnophiles, mais pas pour le consommateur lambda. L’aghiorghitiko («saint-georges») est plus souple et d’un abord bien plus facile.» Parti pris régional ? Le fait est que la jeune œnologue, au prénom prédestiné, doublement diplômée, comme son aîné, de Bordeaux, travaillait auparavant à Nemea, la patrie du saint-georges (2500 ha).
Miser sur les blancs «bizarres»

Mais au-delà des querelles régionalistes, elle témoigne : « On pense que l’avenir se joue sur la curiosité des amateurs de vins pour des cépages originaux et bizarres.» Un discours qui devrait ravir les Suisses, Valaisans en tête ! Et c’est sûrement en blanc que la Grèce dispose des meilleurs atouts. Non seulement avec des muscats très aromatiques, mais aussi avec des vins secs de belle personnalité: l’assyrtiko, typique de Santorin, mais qui se plaît aussi au nord, le malagousia, qui rappelle le viognier rhodanien, le savatiano, le plus répandu, cépage de base de la retsina (enrichie de résine naturelle de pin) ou le roditis, au nez discret, citronné, qui évoque «notre» chasselas ! Comme il est planté dans toute la Grèce, il est aussi influencé par les divers terroirs…
Question de marketing

Et puis, dans l’entre-deux, il y a la palette des assemblages entre cépages autochtones et internationaux, comme le chardonnay-assyrtiko, le viognier-assyrtiko, l’assyrtiko- malagousia-chardonnay de Claudia Papayanni. Cet ex-hôtelière a décidé de «changer de vie» en 2003. Pour dix millions de francs suisses, elle s’est offert une cave et 20 hectares de vignes dans les montagnes de Chalcidique, à Arnea. Les voûtes du chais à barrique sont en toc. Elle en rigole : «C’est mon côté Hollywood !», elle qui est partie étudier le marketing à Boston (USA). Et c’est sûr, la vente, l’ex-hôtelière la maîtrise : ses vins sont déjà très présents. Si les blancs sont d’un bon niveau, il faudra encore attendre que les vignes plantées en rouge prennent de l’âge et perdent leur verdeur.
Eclairage
Un concours international à l’appui
Depuis neuf ans, Thessalonique organise un concours international de vins. International par les dégustateurs (réd. : Pierre Thomas faisait partie du jury) et un peu moins par les vins (à l’exception de Chypre, de l’Espagne ou du Brésil). Cette année, sur 809 vins dégustés, 53 médailles d’or ont été attribuées. Une seule «grande médaille d’or» est allée à un exceptionnel «Vinsanto» de quatre ans d’âge de l’union des coopératives de Santorin (pas exporté en Suisse). Parmi les médailles d’or, le sauvignon blanc du Domaine Gerovassiliou, qui vient d’ouvrir à Epanomi un musée du vin instructif, l’assyrtiko (blanc sec) de Sigalas sur l’île volcanique de Santorin, l’assemblage xinomavro-merlot Yianakohori de Kir Yanni, le Megas Oenos du Domaine Skouras ou le muscat liquoreux Samos Grand Cru de la coopérative locale. Des vins distribués en Suisse romande, avec d’autres, par Pacor SA à Marly (FR) (www.pacor.ch) ou par Smyrliadis et Cie, à Oron-la-Ville (VD) (www.smyrliadis.com).

Paru dans Hôtel Revue du 19 mars 2009.