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Posted on 27 juillet 2011 in Tendance

LVMH sort sa collection de grands vins

LVMH sort sa collection de grands vins

Le goût «mondial» mis en boîte

Le groupe Louis Vuitton, Moët, Hennessy (LVMH) a placé dans une seule boîte «grand luxe» six vins de ses domaines du monde entier.
Par Pierre Thomas

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Qui dit groupe multinational tombe sous la suspicion d’une standardisation du goût. Le «flying winemaker» (œnologue volant) bordelais Michel Rolland et le gourou des vins américain Robert Parker sont ainsi régulièrement montrés du doigt. Avec son «article de luxe», dessiné par le styliste argentin Pablo Reinoto, vivant à Paris, LVMH succombe-t-il à ce travers, réel ou supposé? Récemment, deux œnologues des domaines du groupe étaient de passage à Genève, à l’Hôtel Kempinsky. A la dégustation, force est de constater que les vins ne sont pas identiques. Expriment-ils un style «maison»? Difficile à affirmer, même si on sent la patte de l’œnologie moderne.

Un seul blanc pour cinq rouges

Un seul blanc fait partie du coffret : le sauvignon néo-zélandais Te Koko 2007, du domaine de Cloudy Bay. Ce vin possède à la fois la fraîcheur du cépage et une belle texture, soulignée par l’élevage en barriques (pas neuves). Un peu comme si la meilleure expression de Sancerre s’alliait au savoir-faire de la Champagne à l’autre bout du monde : dans l’œnologie moderne, les extrêmes se rapprochent.
Du sud-ouest de l’Australie, de Cape Mentelle (Margaret River), le Cabernet Sauvignon 2004, au nez mentholé, chocolaté, avec une finale acidulée, paraît plus «variétal» que le quatuor d’assemblages rouges qui l’accompagne. The Puzzle 2005 (cabernet sauvignon, 46%, merlot , 29%, cabernet franc, 21%, et de petit verdot, 4%), du Domaine Newton, à Napa Valley, affiche une exubérance toute californienne, au boisé toasté, avec une finale sur le sésame grillé. L’Argentine est doublement à l’honneur avec le malbec Afincado 2005, haut de gamme du domaine Terrazas, et le Cheval des Andes, dans le millésime 2006, (60% malbec, 35% cabernet sauvignon et 5% petit verdot). «Depuis le premier millésime, 1999, nous nous attachons à une démonstration qualitative», confie l’œnologue Nicolas Audebert, 36 ans, attentif à l’assemblage des cépages et des barriques. «Mon savoir-faire, je l’ai appris chez Krug, en Champagne», souligne le Français.

Faire briller des vins méconnus

Un vin espagnol, le Temanthia 2007, des Bodegas Numanthia, issu à 100% de vieilles vignes de «tinta de Toro», la variété locale du tempranillo, parfait le choix. Tri à la vigne, éraflage grain à grain à la main et foulage au pied préludent à ce vin, riche, suave, au nez de banane flambée au rhum, soutenu par une rapicolante acidité. «Un vin vraiment grand l’est à tout moment : dans sa jeunesse, comme dans le temps qu’il faut lui laisser», rappelle son «géniteur», Manuel Louzada. Cet œnologue, issu d’une famille portugaise impliquée dans le vin depuis quatre générations, a débuté dans la vallée du Douro, à l’époque où LVMH élaborait encore des portos (sous la marque Rozès, vendue à Vrancken). A 41 ans, il est le coordinateur des œnologues «maison» de LVMH.

Le vin, luxe des enchères

Il n’exclut pas l’acquisition de l’un ou l’autre domaine à l’avenir. «Mais pas à Bordeaux ou en Bourgogne, plutôt dans des régions peu connues, où nous démontrons qu’il est possible de faire de grands vins.»
A Bordeaux, grâce à son patron, Bernard Arnault, le groupe LVMH est déjà doté de Château Yquem et d’une moiité de Cheval Blanc, en partage avec le baron belge Albert Frère. Les deux viennent d’y inaugurer (le 9 juin 2011) un nouveau chais, dessiné par l’architecte Christian de Portzamparc (La Cité de la Musique à Paris). Fin juillet, on a appris qu’un flacon de Château d’Yquem 1811 a été vendu à Londres à 85’000 euros (90’000 fr. suisses) soit le record à ce jour pour un blanc, tandis que le vin rouge le plus cher au monde est un Cheval-Blanc 1947, misé et emporté chez Christie’s à Genève en novembre 2010 à 304’375 dollars (250’000 fr. suisses au cours d’été 2011).
Le groupe multinational LVMH est récemment entré dans le capital de la société de distribution de crus de Bordeaux par Internet, Wine & Co. Mais pas besoin de disposer d’un vaste réseau pour cette «ultimate collection box» : il y en a cinq exemplaires pour toute la Suisse, au prix de 900 francs pièce. Soit le nombre vendu en un seul jour chez Harrods, à Londres…

Paru dans Hôtel Revue, 25 juillet 2010.