Vins suisses — Quand Paléo la joue oeno
Vins suisses — Quand Paléo la joue oeno
Les vins vaudois à l’honneur à Nyon
Par Pierre Thomas
«Il aime le bon vin, j’aime bien Paléo», dit de Fabrice Thorin, Raymond Paccot, à l’origine de cette initiative. «Est-ce que ça allait avec note image que nous voulons haut de gamme? Le festival a dû nous convaincre», reconnaît le vigneron de Féchy, «et ce qui nous a séduit, c’est que nous allons toucher des publics divers par l’âge, le milieu social et la connaissance du vin.»
Diplômé de l’Ecole hôtelière de Lausanne, où il a enseigné, mais employé depuis six ans à plein temps de Paléo, Fabrice Thorin analyse : «Notre démarche est identique à celle qui prévaut pour la musique : nous proposons différents styles, mais avec une forte identification à la région. L’amélioration de l’offre en vins participe de l’évolution naturelle du public, comme ces fidèles de Paléo, qui avaient vingt ans, il y a trente ans.»
Un bar classieux
Pour des raisons d’intendance — récupération des déchets autant que sécurité — les verres sont en principe bannis du terrain de spectacle de l’Asse, condamnant le vin au gobelet en plastique. Tel ne sera pas le cas au bar à vins d’«Arte Vitis». Les douze vignerons de l’association, qui figurent parmi les meilleurs du Pays de Vaud, se relaieront, en duo, chaque jour. Un personnel, jeune et amateur de vins, servira les vins sélectionnés — deux par producteur. Les vins seront stockés dans une remorque frigorifique, servis à température adéquate, dans des verres… en verre. La localisation du bar à vins, dans la zone plus tranquille des restaurants, où il est possible de manger assis, autorise ce passe-droit. Le bar vendra les vins «à l’emporter» pour être consommés sur le site. Mais l’environnement sera favorable à la dégustation. Le chef de cuisine Claude Joseph, d’Apples, proposera des «tapas» vaudoises et servira douze vins (plus un mousseux) aux tables du restaurant qu’il installe à Paléo.
Le rosé cartonne toujours
Il fut une époque où il se buvait «des camions de rosé»… Le «vin de l’été» peut encore s’écluser à hauteur de près de 13'000 litres, contre 4'000 de blanc et 5'000 de rouge. On ne parle là que des «vins du festival», servis dans les divers bars. Mais ces vins-là ne sont pas choisis au hasard. «On a amélioré au fil des ans nos critères de sélection», explique Fabrice Thorin. Ainsi, en mai, un panel de dégustatrices et de dégustateurs s’est réuni pour choisir les cuvées de Paléo, parmi des échantillons présentés par les principaux encaveurs de La Côte, car le festival défend avant tout les crus locaux.
Entre les cuvées de Paléo et le haut de gamme d’«Arte Vitis», il y a encore place pour d’autres vins vaudois : chaque année, Paléo choisit un Calamin, un Yvorne et un gamaret de La Côte, tandis que le groupement de promotion Provinyon est présent avec un pinot noir sélectionné.
35'000 bouteilles pour 210'000 spectateurs
Sur le site, le club service «La Table Ronde» de Nyon anime un bar à vins dans le «quartier du Midi», le restaurant du «Terroir vaudois» propose une sélection en accord avec les mets servis et des «vins du monde» sont proposés au bar du Chardonnay. Aux vins vaudois s’ajoutent des genevois, des valaisans et du Nouveau Monde, pour un total de 35'000 bouteilles pour 210'000 spectateurs. La démonstration qu’à l’Asse, on ne meurt pas de soif, mais qu’on peut se faire plaisir. Et que le vin, comme la musique, fait bel et bien partie d’une culture de partage, donc populaire.
*Le festival affiche complet. 500 billets seront cependant mis en vente pour chaque soirée, le jour même, dès 9 h., sur www.paleo.ch et auprès des points de vente Ticketcorner. Infos : www.paleo.ch
Eclairage
Aux origines d’une passion
Paléo désigne deux vins italiens, rouge et blanc, de la région de Bolgheri, voisins donc de Sassicaia, du marquis Nicola Incisa della Rochetta, qui fit son collège au Rosey, à Rolle, et de Grattamaco, qui appartient à la famille Bertarelli, bourgeoise de Coinsins. Pour peu, cette parenté «côtière» laisserait croire que le festival nyonnais s’est inspiré du vin toscan. Tout faux, puisque son nom vient d’un cheval de course…
Il faut donc chercher la culture vitivinicole du Paléo ailleurs. Et quand on parle du festival, qui fête ses trente ans, Daniel Rossellat n’est jamais loin. «Fine papille» (et animateur d’un cénacle éponyme), le «boss» et sa garde rapprochée apprécient la bonne chère et les bons vins. Au point que Daniel Rossellat en fit commerce. Il décrocha le diplôme de marchand de vin à Changins, passage obligé à l’époque, et a parcouru la plupart des vignobles du monde, Californie, Afrique du Sud et Australie comprises.
Quant à Fabrice Thorin, il s’est pris au jeu de la dégustation. L’an passé, il a terminé cinquième du concours vaudois du Verre d’or et s’est même imposé dans le concours des régions, pour le titre de «chapeau noir». Petit-neveu de feue Tante Marthe — la cousine gruérienne des «mères lyonnaises» —, il a toujours baigné dans une ambiance hédoniste, qu’il a retrouvée à Paléo : «Parmi les responsables, on est tous férus de vins. On finit souvent une soirée avec un chasselas!»
Le choix d’Arte Vitis à l'Asse
Mardi : Domaine de Marcelin-sur-Morges, Philippe Charrière, deux assemblages rouges, un gewurztraminer ; Pierre Monachon, Saint-Saphorin, pinot-gamay et merlot.
Mercredi : Henri Chollet, Villette, plant du Rhin et rosé ; Caves Cidis, Uvavins, Tolochenaz, Rodrigo Banto, deux mousseux «Bleu nuit» et «Viva», assemblage rouge cabernet-garanoir.
Jeudi : Blaise Duboux, Epesses, Dézaley et chardonnay ; Philippe Gex, Yvorne, pinot noir et pinot gris.
Vendredi : Louis-Philippe Bovard, Cully, sauvignon et chenin-chasselas ; Jean-François Neyroud, Chardonne, rosé et Calamin,
Samedi : Pierre-Luc Leyvraz, chasselas ; Raymond Paccot, Féchy, chasselas et pinot-gamay.
Dimanche : Raoul Cruchon, Echichens, «blanc de noirs» et chardonnay passerillé ; Christian Dugon, Arnex-sur-Orbe, chardonnay et assemblage rouge.
Les vignerons sont présents le jour mentionné, mais leurs vins peuvent être dégustés durant toute la durée du festival.
Article paru dans la revue Le Guillon, été 2005.