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Posted on 1 mai 2024 in Tendance

Sur les pistes de l’œnotourisme valaisan

Sur les pistes de l’œnotourisme valaisan

Qu’est-ce que l’œnotourisme? Souvent, les domaines viticoles suisses en font comme Monsieur Jourdain, de la prose : sans le savoir… Au moment d’écrire cet article (avril 2024), sur le site des vins du Valais figuraient 88 références*. Le gros de l’offre concerne une quinzaine de balades à faire à pied, dans le vignoble. Et surtout, plus d’une cinquantaine pour des œnothèques, bars à vin, caveaux ou guérites, où le touriste est le plus souvent captif d’un seul producteur… On peut donc saluer le parcours piloté par l’Office du tourisme de Sion, en passant par quelques monuments insolites et fermés d’ordinaire au public (la Tour des Sorciers, les thermes romains), où est servi, à cinq étapes un vin d’un encaveur de Sion, choisi par tournus. Ou encore le «winebus» Grand Cru Ville de Sion, qui fait halte, tous les samedis, de 11 h à 18 h, dans les dix caves partenaires.

Par Pierre Thomas

Alors qu’un appel à candidatures des Prix suisses d’œnotourisme 2025 est lancé avec un palmarès proclamé le 9 octobre prochain, Je suis allé faire un tour en Valais chez deux lauréats 2024, la Maison Gaillard, à Sion, prix «découverte et innovation» pour ses visites en famille de la cave, et le Castel Daval, dans la plaine du Rhône, entre Sierre et Chalais, «prix architecture et paysage» (photo ci-dessous). La compétition en est à sa septième édition. Le titre suprême, «Best of wine tourism» pour la Suisse, est revenu, l’an passé, au «Train du vigneron», sur la ligne vaudoise du Bière-Apples-Morges (BAM). Quant au prix «art et culture», il a récompensé le parcours d’art du Domaine du Mont-d’Or (VS), à l’occasion de son 175ème anniversaire. La Cave Couronne 1669, à Morat (FR), en restauration et hôtellerie, Wine Tours Switzerland à Maienfeld (GR), en services et organisation, et la Cantina Settemaggio (TI), prix artisan pour sa nouvelle cave, à Giornico complétaient le palmarès. Qui va leur succéder ? Dossiers à présenter jusqu’au 31 mai, sur www.swissoeno.ch.

Coup de projecteur sur quelques nouveautés, grâce à un voyage de presse organisé par une agence de relations publiques bernoise, chez ses principaux clients. Avec un focus sur l’œnotourisme.

En plein centre de Sion, la Maison Favre (groupe sierrois Rouvinez) vient d’investir luxueusement les sous-sols de l’évêché, avec magasin, salle de conférence et chai à barriques. Pour rejoindre la Maison Gilliard, il faut marcher un peu… Une œnothèque moderne propose les diverses gammes de cette maison, fondée par un Vaudois en 1885. Elle vient d’enrichir son patrimoine (75 hectares de vigne) des 7 ha cultivés à Fully par Henri Valloton. Le passage en bio bourgeon a permis à la Maison Gilliard de proposer une Dôle des Monts «verte», dès le millésime 2022. Tant par la structure, solide grâce à 27% de merlot, que par son prix, 24,90 fr., elle se distingue de la formule de base, fidèle à la tradition.

Entre deux musées, la Raspille

Depuis 2006, Gilliard appartient au groupe Schuler, actif depuis 330 ans dans le monde suisse du vin et en main de la onzième génération. En Valais, il a racheté en 2021, Domaines Chevaliers, et ses 10 hectares de vigne à Salquenen. Les deux entités ont désormais le même œnologue, Samuel Panchard, qui est revenu en Valais en 2020. Il prend le relais du Vaudois Christian Gfeller, qui va succéder à Gilles Cornut, directeur technique de la Cave de la Côte, principale coopérative vaudoise, à Tolochenaz.

Parmi les promenades les plus agréables, celle de Sierre à Salquenen permet de relier les deux espaces du Musée de la vigne, d’à côté du Château de Villa au vieux village de Salquenen. Le premier propose des expositions thématiques — «Dessine-moi la vigne de demain» dure jusqu’au 1er décembre 2024 —, le second, un parcours didactique dans le monde vitivinicole valaisan. Et entre-deux, on franchit la Raspille, frontière des langues, torrent impétueux au printemps !

Une colline hautement diversifiée

A Sierre, au milieu de la plaine du Rhône, la Colline de Daval, témoin calcaire de l’éboulement du glacier, il y a 13’000 ans, abrite une des entreprises familiales les plus diversifiées du Valais. Elle s’est rapprochée de la route de Chalais, par la construction, juste terminée, d’une vaste halle de 800 mètre carrés, qui lui sert de stockage, de salle des machines et d’œnothèque.

Depuis plus d’un siècle, la famille Caloz a multiplié les activités. Les trois enfants de Bertrand et Monique Caloz-Evéquoz ont chacun leur secteur d’activité. Le domaine viticole est complété par la culture d’asperges, l’arboriculture (notamment des pommes Lady Pink, dont on fait aussi un cidre, et les abricots, dont on tire un jus), et la distillation avec un propre alambic, depuis 2015.

Les parents avaient fait l’œno à Changins et Monique Evéquoz a amené dans la corbeille de mariée, 2,5 ha de vignes familiales à Chamoson. Elles s’ajoutent à 3,5 ha à Sierre, en bio fédéral, d’abord sur la colline de Daval mais aussi sur la rive droite du Rhône. La gamme des vins, moitié blanc, moitié rouge, offre deux fendants, deux petites arvines et deux cornalins, alors que le pinot noir et le merlot ne figurent qu’à Sierre, où tout est vinifié à côté du Castel de Daval, qui donne son nom aux vins haut de gamme. C’est aussi une maison d’hôtes, de cinq chambres confortables, récompensée par un prix d’œnotourisme suisse, en catégorie architecture et paysage, en 2019. De 1949 à 1970, la structure en pierres de taille, fut bel et bien un château… d’eau, alimenté par le bisse qui surplombe Chalais. En 2006, les Caloz ont pu racheter le bâtiment et les vignes de leur propriétaire bernois.

Diplômé de l’Ecole du tourisme de Sierre et de l’Ecole du vin de Changins, Benoît Caloz, en charge de l’accueil et de la dégustation, l’assure : «Le vin a toujours été au cœur du domaine». Certains crus sont labellisés Marque Valais, dont la charte, volontaire, vise «une viticulture durable» (comme une vingtaine de caves, mais la liste disponible sur Internet n’est pas à jour…). Monique Caloz-Evéquoz, qui assure vouloir prendre sa retraite, relayée par la caviste Jessica Lamon, présente ses vins aux concours (Mondiaux des pinots et du merlot à Sierre et Grand Prix du vin suisse), où ils sont régulièrement médaillés, et vise le Grand Cru de Sierre pour son fendant et son cornalin. Le domaine propose pour la première fois un gamaret en vin nature, le Gamaste. Vendu 33 francs la bouteille, un franc de moins que l’originale cuvée, issue de raisins rouges mi-flétri élevée 18 mois en barriques neuves, Davalrone. Se diversifier, c’est aussi savoir profiter des tendances du moment !

* Sur le net

Paru dans Hôtellerie et Gastronomie Hebdo du 1er mai 2024, dans cette version:

https://www.hotellerie-gastronomie.ch/de/article/loenotourisme-comme-diversification-pour-les-vignerons

© thomasvino.ch