Vaud — Trois dossiers en souffrance
Trois dossiers en souffrance
Est-ce parce que les stocks de vins suisses n’ont jamais été aussi bas? Le fait est que les vignerons ont du temps à perdre en chamailleries. Trois exemples.
Par Pierre Thomas
Il y a des assemblées, en principe ennuyeuses, pourtant seules sources pour faire le point sur des dossiers d’actualité. Ainsi, celle de la Fédération vaudoise des vignerons (FVV), mercredi 5 novembre, à Prangins. On y a appris que la Fédération suisse des vignerons (FSV) a implosé. Un dossier périlleux qui s’ajoute à l’avenir incertain de l’Office des vins vaudois (OVV) et aux difficultés que rencontrent les Vaudois à se mettre d’accord sur le resserrement des appellations d’origine contrôlée (AOC). Reprenons.
Vignerons suisses en «standby»
Les déboires de la FSV complètent la mise en veilleuse de l’Interprofession suisse du vin, qui ne siège plus. Et Berne se voit dans l’obligation de faire de l’arbitrage, à son grand dam, est venu dire Frédéric Rothen, le fonctionnaire fédéral spécialiste des affaires viticoles. Après le licenciement, à mi-juin, de la directrice de la FSV, celle-ci devrait confier son secrétariat à une institution externe. Le choix devrait se porter, a expliqué le vice-président national et président vaudois, Willy Deladoey, soit chez Agora, soit auprès de l’Union suisse des paysans, dans les deux cas à Berne, où la FSV avait ses bureaux.
Joyaux de la Couronne vendus ?
Quand il y a délégation, il y a déjà démantèlement… Après avoir divorcé d’avec son directeur, cet été aussi, l’OVV planche sur des solutions. Pour le président de son comité, Kurt Egli, tous les scénarios son envisageables. Y compris de vendre la Maison de la Vuachère, siège de l’OVV et symbole vitivinicole vaudois. Un vigneron l’a, du reste, rappelé : à l’époque de son achat, on avait fait appel à la générosité des professionnels, qui en sont donc les copropriétaires…
Avant d’arriver à cet extrême, l’OVV a d’autres scénarios. Son administration pourrait aussi être externalisée, afin d’optimaliser les dépenses de communication, avec une campagne en Suisse alémanique, confiée à une agence. Au passage, le Comptoir suisse serait prêt à sauver le populaire concours de dégustation Jean-Louis, malgré le désengagement financier de l’OVV. L’office prévoit d’engager un directeur ou une directrice. Reste à savoir à qui il (elle) sera subordonné(e): à un comité ou directement à la Communauté interprofessionnelle du vin vaudois. Kurt Egli est prêt à saborder son échelon intermédiaire…
Quand l’AOC n’est qu’IGP
Les vignerons vaudois ont passé comme chat sur braise sur le dossier des AOC viticoles, crus et grands crus. Dans sa forme écrite, le rapport du secrétaire de la FVV, Philippe Herminjard, explique que le Département cantonal de l’économie «devra vraisemblablement trancher, car les acteurs concernés ne paraissent pas aptes à se mettre d’accord sur des points de détail». La mise en consultation d’un projet est attendue pour la fin 2008, avec décision du Conseil d’Etat pour les vendanges 2009, dans le scénario le plus optimiste.
Ex-responsable des AOC agro-alimentaires fédérales, le nouveau chef du service de l’agriculture vaudois, Frédéric Brand, a fait remarquer que l’AOC viticole fait davantage penser à une IGP («indication géographique protégée»), faute d’exigences hors de la vigne, notamment pour la vinification. Un point de vue soutenu par plusieurs vignerons, qui passent pour des iconoclastes, et admis par les consommateurs. Plus strictes, des AOC permettraient aussi de mieux de défendre l’image des vins, vaudois ou suisses. Mais le Valais s’y est cassé les dents: son projet, jugé trop contraignant, a été renvoyé à l’expéditeur par le Grand Conseil, l’an passé.
Paru dans Hôtel Revue du 13 novembre 2008.