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Posted on 23 mars 2011 in Vins suisses

Vaud — Les Faverges, plus grand domaine de Lavaux

Vaud — Les Faverges, plus grand domaine de Lavaux

Gérald Vallélian, Domaine des Faverges, St-Saphorin

Vive la diversité… vaudoise !

Il ne hisse jamais le drapeau noir et blanc. Mais Gruérien, Gérald Vallélian signe les vins du plus grand domaine de Lavaux, propriété de l’Etat de Fribourg.
Par Pierre Thomas
C’est un des plus anciens domaines de Lavaux. Un parchemin daté du 25 février 1138 l’atteste. Ces vignes n’ont connu que deux propriétaires : pendant sept siècles, l’abbaye cistercienne d’Hauterive, puis l’Etat de Fribourg, dès le début du 19ème siècle. Aux Faverges se sont ajoutées les vignes d’Ogoz, de l’abbaye prémontrée de Marsens-Humilimont, en Gruyère, supprimée au 16ème siècle. Ses biens passèrent au Collège Saint-Michel, qui les cèda en 1962, formant ainsi ce grand domaine de 15,5 hectares. Il s’étage entre l’autoroute et le village de Saint-Saphorin et est traversé de part en part par la ligne du «train des vignes».
De vieux pressoirs qui re-servent
Ces dernières années, le domaine a connu la construction d’une annexe à la cave. La belle salle «des pressoirs», «désarmée» en 1964, a été réutilisée dès 2006, pour élaborer la Cuvée du Patrimoine. Ce rouge d’assemblage est une des fiertés de Gérald Vallélian, 45 ans. Avant son arrivée en 2004, deux vignerons sous contrat cultivaient le domaine. L’un, Yvan Regamey, est resté. Et le nouveau venu a repris l’autre moitié des vignes, ainsi que la vinification, alors sous-traitée à un «tonnelier». «La taille du domaine, d’un seul tenant, justifie pleinement l’élaboration de A à Z des vins», explique Gérald Vallélian, formé sur le tas et à Changins. Fils de paysan, il a bourlingué de La Côte au Chablais, en passant par Lavaux et en est à sa trentième saison viticole. «Je suis arrivé un peu par hasard à la vigne, mais j’y suis resté par passion», dit-il. Une passion communicative : un de ses fils a décroché son CFC de vigneron.

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Gérald Vallélian devant le fameux Vase No 1 (photo Pierre Thomas).

Trois kils de syrah
Réaménagé en larges terrasses mécanisables, replanté en cépages rouges dès 1970, puis dès 1990, le vignoble des Faverges a évolué. En cave, cela se traduit par plusieurs vins qui sortent de la tradition, bien ancrée à Fribourg, du Faverges blanc ou rouge. On y a planté du pinot meunier et du chenin blanc pour requinquer un mousseux en méthode traditionnelle, qui devrait être brut dès ce millésime 2010.
En rouge, «on a 3 kilomètres de syrah», rigole Gérald Vallélian, soit la longueur des murs contre lesquels le cépage rhodanien mûrit. A l’image des Monachon, Bovard et Chollet, trio d’Arte Vitis à Lavaux, les Faverges ont aussi près d’un hectare de merlot. En 2009, grand millésime rouge, le vigneron-caviste en a bichonné quelques barriques: «J’ai fendu et séché moi-même le chêne, acheté à Suchy, et façonnée à Saint-Légier.»
Chaque cépage est vinifié séparément, mais est réparti entre le Faverges rouge, à majorité pinot-gamay, et la Cuvée du Patrimoine. Le 2007 de ce rouge concentré a obtenu la seule médaille d’or vaudoise du concours AWC, à Vienne (Autriche) en 2010. Le 2008, plus fruité, sera servi en première classe de Swiss. Et le 2009 s’approche de la formule idéale, avec 30% de merlot, 25% de gamaret, 25% de pinot noir, 10% de syrah et 10% de gamay.
Des vins bien élevés
L’assemblage n’est décidé qu’après dégustation, à a fin d’un an en fûts. Et c’est aussi dans un gros fût de 6’200 litres, le «Vase No 1», plus large que haut, que le chasselas éponyme séjourne un an. Avec bâtonnages réguliers sur lies, mais sans fermentation malolactique, pour équilibrer gras et acidité. Gérald Vallélian, qui s’essaie au bio sur certaines parcelles, fait en sorte que l’originalité du domaine ne soit pas d’être fribourgeois. «On n’est pas obligés de tous faire les mêmes vins», dit-il. Même les Chinois pourront y goûter en juin, où Fribourg est l’invité officiel de la Foire de Ningbo, port sur la baie de Hangzhou, au sud de Shanghai.

Quoi ?
Un domaine de 15,5 ha d’un seul tenant, soit le plus grand de Lavaux et le deuxième du canton (derrière Sarraux-Dessous, à Luins) ; un tiers des vignes sont plantées en cépages rouges.
Comment ?
Près de 150’000 flacons. Ouvert toute l’année, le samedi matin de 10 h à 12 h., et sur demande.
Combien ?
Sept vins, du chasselas Saint-Saphorin Grand Cru à l’assemblage rouge Cuvée du Patrimoine, dont un rosé de pur garanoir (en 2010), uniquement en pot de 50 cl (9.95 fr.) et un mousseux méthode traditionnelle, demi-sec, «Seigneur de Glâne» (18 fr.).
Où ?
Domaine des Faverges, entre la Route du lac et Chexbres, tél. 021 946 29 74.

Les 3 coups de cœur Pierre Thomas

Domaine des Faverges, Saint-Saphorin Grand Cru, 2009, 13.90 fr, noté 85/100

Le cheval de bataille du domaine. Un chasselas traditionnel, élevé par tournus dans des vases de bois ; léger caramel au nez ; ouvert, frais ; structure moyenne ; notes citronnées en fin de bouche — un tiers du volume n’a pas fait sa deuxième fermentation en 2009 (100’000 flacons).

Vase No 1, 2008, 17.30 fr, noté 87/100

«Un chasselas autrement», résume Gérald Vallélian. Au nez, traces de bois, de noix de coco ; attaque souple, mais avec du nerf et de la vivacité ; étonnante jeunesse et légère amertume en finale, sur la prune reine claude (5’000 bouteilles).

Cuvée du Patrimoine, 2008, 24 fr., noté 90-92/100

Nez de fruits rouges, avec des traces florales de pivoine, d’écorce d’orange ; attaque poivrée, trahissant la syrah ; moins concentré que le 2007, mais plus fruité ; un assemblage rouge agréable, d’une bonne complexité, à boire, mais qui se bonifiera quelques années (8’000 bouteilles).

Paru dans 24 Heures du vendredi 25 mars 2011. Version en PDF.