Valais et Vaud baissent (un peu) leurs quotas 2012
Moins de vin valaisan et vaudois en 2012?
Ces quotas cache-misère
Par Pierre Thomas
Les Valaisans ont même, pour la première fois depuis longtemps, publié près de trois mois avant les vendanges, une grille de prix selon les cépages. Mais le conseiller national Christophe Darbellay, président du PDC suisse et surtout président du conseil d’administration de la cave Gilliard SA, ne croit ni à la baisse des quotas, une mesure «placebo» alors que «le Valais n’a jamais produit plus de 1 kg au m2», ni aux prix conseillés «qui ne seront pas tenus». Il l’a dit avec force à la chaîne de TV valaisanne Canal 9.
En-dessous des quotas fédéraux
Ces dernières années, les Valaisans s’étaient alignés, pour les cépages les plus quantitatifs, sur les quotas fédéraux, inchangés depuis vingt ans (1991), soit 1,4 kg pour le chasselas et 1,2 kg pour le gamay et le pinot noir. En 2012, le chasselas perd 100 g. à 1,3 kg, le gamay et le pinot noir, 200 g., à 1 kg au m2. Le goron passe lui de 1,6 kg à 1,4 kg. Les autres cépages restent à 1,2 kg au m2 (selon l’article 43 de l’ordonnance sur la vigne et le vin de 2004), avec la possibilité de globaliser les «spécialités»: récolter 0,8 kg de petite arvine permet d’encaver 1,6 kg de païen-heida, et 0,8 kg de cornalin, 1,6 kg d’humagne rouge… Un habile système de vases communicants! On notera que les grands crus communaux sont assez largement en-dessous de ces quotas.
L’Interprofession de la vigne et du vin du Valais (IVV), présidée par un autre PDC, l’ex-conseiller national Paul-André Roux, «tout dépassement de ces quantités entraînera le déclassement de la totalité de la vendange en catégorie inférieure». Encore faut-il pouvoir vérifier qui triche à la vigne: l’IVV, depuis plusieurs années, procède à des contrôles serrés par secteurs. Signe des temps, pour la première fois, les Vaudois ont invité les Valaisans à leur montrer comment ils font, début juin… Jusqu’ici, le contrôle suivait la bonne foi du viticulteur vaudois.
Des prix indicatifs pour des prunes?
En Valais, la question des prix agite le landerneau. L’an passé, la publication de l’échelle de prise en charge de la coopérative Provins (un bon quart de la vendange) avait soulevé un tollé. Cette échelle répondait pourtant à une volonté de faire monter en qualité le raisin obligatoirement encavé, car Provins est tenu de prendre en charge la matière première de ses sociétaires. Au détriment, bien sûr, des gros producteurs. Pour l’esenmble du vignoble, les prix indicatifs pour 2012 sont ceux observés en 2011 (chasselas, 3 fr. le kg, pinot de 3 à 3,30 fr., gamay, idem) avec 20 ct de bonus pour les spécialités (5,40 fr. le kg pour la petite arvine et le cornalin, 5,20 fr. le kg pour le païen-heida, 4,90 fr. pour l’humagne rouge). Mais qui tiendra ses prix, valable pour un an?
Légère baisse vaudoise
Le canton de Vaud a aussi claironné début juin sa baisse des quotas pour 2012, soit 2,7% de moins sur le plafond maximum autorisé en 2011. Une «première étape d’une politique de promotion qualitative», titre le Bureau d’information et de communication. Les Vaudois sont les seuls à calculer en «litres de vin clair par mètre carré» et les quotas, au contraire du Valais, sont régionaux. Rapportés en kilos (litres de vin clair multipliés par 1,25), cela donne, pour le chasselas et les cépages blancs, 1,15 kg/m2 en Chablais et à Lavaux, 1,125 kg/m2 à La Côte, Côtes-de-l’Orbe et Bonvillars. Pour le pinot noir et le gamay, 1 kg/m2 partout, sauf à La Côte (0,875 kg/m2), pour les autres cépages rouges, 1 kg également partout, sauf pour La Côte (0,875 kg/m2). Pour les 1ers grands crus (puisque les grands crus n’ont pas de limite supérieure à celle des AOC régionales!), 1 kg au m2 pour le chasselas et 0,8 kg pour le pinot noir et le gamay — aucun n’a passé le filtre de la commission idoine. Pour les vins de pays, Vaud en reste à la limite fédérale de 1,9 kg pour les blancs et 1,6 kg pour les rouges.
Sur son site Internet, valaisduvin.ch, le journaliste spécialisé Paul Vetter parle de «logique économique, bien plus qu’une logique qualitative». Mais les Vaudois ne manquent pas une occasion de souligner que ces efforts se font pour «favoriser la qualité de la production».
Reste à savoir la portée économique d’une légère correction de 2,7% de moins du plafond légal de la production. Pour la mesurer à sa juste valeur, il suffit de se plonger dans les chiffres de la vendange, publiés chaque année par l’«Office cantonal de la viticulture et de la promotion», comme il se nomme depuis 2011.
Quotas très au-dessus de la réalité
Premier constat : la vendange vaudoise relativement importante de 30,6 millions de litres de 2011 équivaut à celle de 5 ans auparavant, soit en 2007. Entredeux, les vendanges ont été inférieures à l’année précédente chaque fois de 1,38 million de litres (2008), 0,5 million (2009), 0,17 million (2010), puis supérieure de près de 2 millions de litres en 2011 par rapport à 2010. Parallèlement, les statistiques permettent d’annoncer un formidable écart par rapport aux fameux quotas plafonds : en 2008, moins 14,33% pour les blancs, et — 19,51% pour les rouges ; en 2009, respectivement, — 16,78% et — 24,65% ; en 2010, — 16% et — 24,2%. Et même en 2011, «annus horribilis» de la hausse de la récolte et de la baisse notable de la consommation des vins vaudois (et valaisans), — 9,22% pour les blancs et — 8,62% pour les rouges.
Alors, en 2012, ces — 2,7% annoncés et durement négociés auprès de la production paraissent bien modestes — un «placebo», dirait un conseiller national valaisan. L’Etat de Vaud a raison d’annoncer une «première étape d’une politique de promotion qualitative». On attend de pied ferme les suivantes!
©thomasvino.ch