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Posted on 19 janvier 2005 in Vins suisses

Valais — Petite arvine, grand cépage

Valais — Petite arvine, grand cépage

Petite arvine, grand cépage
Elle ne représente que 60 hectares sur les 5000 du vignoble valaisan, mais elle est sans conteste une vedette du renouveau du Vieux Pays. (Liste des meilleurs producteurs actualisée en fin de fichier – mars 2009)
Par Pierre Thomas
Tout ce qui est rare est bon. L'explication est un peu courte pour la petite arvine, un cépage dit de troisième époque, donc au mûrissement tardif et propre au Valais. De fait, sa plantation se limite aux meilleures expositions et pas question de la voir se généraliser dans tout le vignoble… 60 hectares, cela fait, du reste, déjà un demi-million de bouteilles.
L'avenir de la petite arvine paraît aujourd'hui assuré.
Trois éléments y concourent. D'abord, elle fut la première, il y a dix ans, à faire l'objet des mesures de «sauvegarde et de mise en valeur du patrimoine viticole valaisan». Ensuite, depuis un an, et après des travaux déjà réalisés à la Haute école spécialisée de Sion, elle est étudiée à plein temps par une jeune chercheuse. Enfin, elle intéresse quelques uns parmi les meilleurs viticulteurs d'Europe: des Valaisans l'ont implantée en Vallée d'Aoste dès 1970, le Piémontais Angelo Gaja ou le Languedocien Aimé Guibert (Daumas-Gassac) en ont quelques pieds. Et la maison Chapoutier a reçu l'autorisation, à titre d'essai, d'en planter un demi-hectare à Tain-l'Ermitage.
Plus complexe que le viognier
C'est que l'arvine possède toutes les qualités pour faire un grand vin blanc. Son parfum de citron vert, de rhubarbe et de pamplemousse évoque l'exubérance du viognier très à la mode actuellement. Mais si le viognier est plus précoce, il souffre, dans des conditions chaudes, d'un manque d'acidité, au contraire de l'arvine. Et puis, un seul clone du cépage fétiche de Condrieu a été largement multiplié, alors que les Valaisans ont précisément veillé à sauvegarder une centaine de ceps aux caractéristiques toutes différentes, certifiés «Sélection Valais». Cette démarche a valu fin novembre au président de la Société des pépiniéristes-viticulteurs valaisans, Paul-Maurice Burrin, un deuxième prix Agro 2002.
D'ici février 2004, Claudia Fretz, ingénieure en technologie alimentaire de l'EPFZ, étudie à Sion les arômes de l'arvine. Cette recherche, menée en collaboration avec le professeur bordelais Denis Dubourdieu — le pape du sauvignon blanc — devrait déterminer quels sont les précurseurs d'arômes du cépage valaisan et permettre ainsi aux vignerons de les favoriser en toute connaissance de cause.
Une stupéfiante diversité
A Fully, les dix-sept producteurs locaux ont pris les devants. Tous les deux ans, ils organisent une manifestation, Arvine en Capitales. Marie-Thérèse Chappaz et Benoît Dorsaz ont démontré que l'arvine supporte parfaitement la surmaturation et le botrytis — la fameuse pourriture noble — alliée à une vinification et à un élevage en fût de chêne neuf. Mais, conduite par le fondateur du Label Nobilis, Dominique Fornage et le sommelier Christian Martray, une dégustation a démontré, fin novembre à Fully, que la plupart des arvines sont aptes au vieillissement. La jeunesse du vin de type sec met en valeur la vivacité, le minéral et la salinité du blanc. Plus mûre, elle peut évoquer les grands rieslings allemands aux arômes de pétrole.
Sèche, si elle possède de la structure, elle est à même de résister aux années. Botrytisée, elle acquiert une complexité protéiforme, qui doit autant à la surmaturation qu'au talent de son éleveur. Et entre deux, le «mi-flétri» peut se justifier, puisque le sucre sert d'exhausteur d'arômes… Le seul regret, c'est que les producteurs abandonnent à leur sort les dégustateurs, qui, faute d'indication sur une contre-étiquette, ne savent pas à quel style de petite arvine se vouer. Une authentique faute de goût qui embarrasse d'abord les sommeliers et les restaurateurs.

Eclairage
Les meilleurs vins labellisés

Il n'y a pas de bonne arvine que de Fully: la preuve par les «Labels Nobilis». La dégustation des 600 vins soumis cet automne a eu lieu il y a dix jours au Château de Villa à Sierre. 73 vins ont obtenu le «Label Nobilis», soit 12% des candidats. Avec treize labels, les vins surmaturés ont particulièrement brillé, devant les assemblages rouges (neuf), les syrahs (huit), les humagnes rouges (sept). Les arvines labellisées sont quatre du millésime 2000: de Julien Carrupt et de René Favre et Fils à Chamoson-St-Pierre-de-Clages, de Maurice Gay SA, à Chamoson également, de Raymond et Christophe Rey, à Corrin-sur-Sierre. S'ajoute l'arvine surmaturée des frères Philippoz à Leytron. Cette année (réd. 2001), ce sont près de mille vins valaisans qui ont été jugés par des professionnels, car à la session d'automne s'ajoutent les 400 vins, pour 51 labels, du printemps.

Paru dans Hôtel+Tourismus Revue en décembre 2001

Les meilleurs producteurs de petite arvine
Sélection pour le magazine Al Dente, avril 2009
Les 10 meilleures sèches

Denis Mercier, Sierre
Didier Joris, Chamoson
René Favre & Fils, Saint-Pierre-de-Clages
Gilbert Devayes, Leytron
La Tornale, Vincent Favre-Caruzzo, Chamoson
Domaine des Muses, Robert Taramacaz, Sierre
Cave Saint-Gothard, Philippe et Véronyc Mettaz, Fully
Domaine du Grand-Brûlé, Etat du Valais, Leytron
Provins-Valais (Maître de Chais), Sion
Château Lichten, Rouvinez, Sierre
Les 5 meilleures liquoreuses
Gérald Besse, Les Serpentines, Martigny
Philippe Darioli, Grain Noble, Riddes
Benoît Dorsaz, Grain de Folie, Fully
Marie-Thérèse Chappaz, Grain Noble, Fully
Domaine du Mont-d’Or, Sous l’Escalier, Pont-de-la-Morge
Deux intruses
Petite Arvine sèche, Domaine des Crêtes, Costantino Charrère, Aymavilles (Vallées d’Aoste)
(La 2006 a été sacrée meilleur vin blanc sec d’Italie par le Guide de l’Espresso)
Petite Arvine liquoreuse, Saint-Pierre (Vallée d’Aoste)
(Le plus grand domaine d’arvine du monde d’un seul tenant, planté par les Valaisans Charly Bréguy et Pierre-Alain Gillioz)