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Posted on 8 mars 2006 in Vins suisses

Neuchâtel — Des terroirs mais pas de grand cru!

Neuchâtel — Des terroirs mais pas de grand cru!

Etude des sols à Neuchâtel
Des terroirs, oui…
…mais pas de grand cru

Après le Pays de Vaud, et avant le Valais et le Tessin, Neuchâtel vient d’achever l’étude des sols de ses 600 hectares de vignoble. Le document, accessible via Internet, débouche sur une question délicate: faut-il définir des grands crus?
Pierre Thomas
Président de la «compagnie des encaveurs neuchâtelois», Thierry Grosjean, du Château d’Auvernier, n’était pas, début février, à la présentation de l’étude des sols, à la Station cantonale de viticulture, à l’autre extrémité de la principale commune viticole neuchâteloise. Mais il ne mâche pas ses mots. «Sur nos 600 hectares, on devrait se consacrer à faire bon, c’est tout. En 15 ans, le pinot noir est passé de 120 à 260 hectares. Il est donc urgent d’attendre avant de procéder à une classification. Quand je dis que je plante de l’œil-de-perdrix derrière le Château, mes collègues rigolent. Mais je sais très bien qu’ici, je ferai du rosé et jamais un grand pinot noir. On manque de recul et de modestie… Il y a deux ans que la discussion sur un grand cru fait rage et si on avait considéré les 2003, 80% des pinots noirs de Neuchâtel eussent mérité d’être grands crus! Pour l’instant, c’est le nom du producteur qui fait foi. Il faudra une demi-génération, 15 ans au bas mot, pour établir une hiérarchie.»
Cent hectares sur le calcaire jaune
Voilà qui relativise l’impact de la cartographie du sol neuchâtelois, à raison d’un «profil» de sol à 2 mètres de profondeur tous les 10 hectares. A l’instar des vignobles vaudois et valaisan, le neuchâtelois s’est formé sous une langue de glace, il y a 12'000 ans. Le sous-sol ressemble à une mosaïque, où l’on retrouve du calcaire du Jura, de la mollasse, de la moraine et des éboulis. Parmi une cinquantaine de types de sols, une vingtaine recoupent 72% du vignoble. Seuls une centaine d’hectares sont établis sur le calcaire de Neuchâtel, tandis qu’entre Bevaix et Auvernier, il s’agit plutôt d’un sol sableux.
Pour le chef de la viticulture neuchâteloise, Eric Beuret, l’étude, commandée au bureau français qui a déjà œuvré dans le Pays de Vaud et, actuellement, en Valais, est avant tout un «outil de travail et pas de décision». Le conseiller d’Etat Bernard Soguel observe, quant à lui, qu’existe «une crainte de classifier les viticulteurs et leurs vins», mais «qu’on sera obligé d’augmenter la qualité. Et un grand cru peut tirer la qualité vers le haut.» Encore faut-il que les vignerons en soient convaincus… Le président de l’Association des terroirs neuchâtelois, Henri-Louis Burgat, pense que «le vignoble neuchâtelois est peut-être trop petit pour un grand cru.» La question, en l’état, divise plutôt qu’elle rassemble.

Article paru dans Hôtel + Tourismus Revue, le 9 mars 2006.