Valais-Vaud-Genève: les meilleurs vins des concours 2007
Les meilleurs vins de l’année
Cette année, chaque région viticole a organisé ses propres sélections, sans finale nationale. Résumé des meilleurs vins, désignés par des jurés où les pros de la vigne et du vin sont largement majoritaires. Mais quelle valeur accorder à ces confrontations?
LIRE EN FIN D'ARTICLE LE COUP DE GUEULE
Chaque région a son mode de procéder ; Valais (968 échantillons présentés) et Vaud (841) annoncent chacun 30% de récompenses. Si, proportionnellement, les vins valaisans paraissent peu nombreux, c’est qu’une seconde session aura lieu d’ici les vendanges. Les résultats combinés des deux concours déboucheront sur les «étoiles d’or», une finale avec un jury distinct. Pour l’heure, 84 étoiles d’or et 261 d’argent ont été attribuées. Les Vaudois en sont restés à un diplôme et un palmarès qui mentionne les points obtenus sur 100. Car les meilleurs rangs se jouent, comme au cent mètres plat, sur des dixièmes! Quant aux Genevois (524 vins dégustés, près de deux fois plus qu’en 2000), ils attribuent 10% de médailles d’or, soit 58 cette année, à des vins qui ont obtenu au moins 88,7 points sur 100. Trois systèmes donc, et une lecture forcément différenciée des résultats.
Sélection strictement valaisanne
A l’appui des sa nouvelle campagne de publicité, l’Interprofession de la vigne et du vin du Valais (IVV) (résultats sur ce lien, par moteur de recherche) n’accepte que des vins de cépages traditionnellement plantés dans le Vieux-Pays, et, comme seul assemblage, la dôle. Le jury a été sévère avec les pinots noirs (4 fois l’or sur 123 vins), les fendants (9 pour 135), la petite arvine (5 pour 97) et la syrah (2 pour 68), beaucoup moins pour les vins doux (18 sur 81, un cinquième des vins primés !) et pour l’humagne rouge (8 pour 60) et le johannisberg (8 pour 67). Grand vainqueur de la confrontation, la cave du Nouveau Salquenen, à Salgesch, d’Adrian Mathier et famille, qui décroche sept médailles d’or. Suivent, avec quatre titres, les frères Antoine et Christophe Bétrisey, à Saint-Léonard, La Madeleine, d’André Fontannaz, à Vétroz, le Domaine des Muses, de Robert Taramarcaz, à Sierre, les Fils Maye, à Riddes et Provins-Valais.
GE = assemblaGEs
A Genève (voir résultats sur PDF), les assemblages rouges font un tabac, avec 12 vins médaillés d’or sur 51 présentés, soit une proportion de primés bien supérieure aux rosés (2 sur 50), aux pinots noirs (5 sur 50), aux chasselas (3 sur 46), aux chardonnays (4 sur 44) ou aux sauvignons blancs (3 sur 34). Quelques journalistes ont, parmi ces assemblages, distingué le meilleur, un 2006, le Marquis de Coudrée, des Dupraz père et fils à Lully, qui n’avait, pourtant, pas décroché de médaille d’or. Le «sanglier d’or», trophée qui échoit au vigneron dont le vin a obtenu le meilleur pointage, revient au Domaine du Centaure, à Dardagny, avec un blanc riche, un Scheurebe 2006. L’Ecole hôtelière de Genève, qui attribue un prix annuel, n’a pu se décider entre un blanc, un sauvignon 2006 du Château de Laconnex, et un rouge, une syrah 2005, de la Cave des Chevalières à Soral. Les Perrières, à Peissy, le Clos des Pins, à Dardagny et Les Vallières, à Satigny, ont raflé entre six et sept médailles d’or… La palme de l’originalité revient à l’assemblage rouge du Domaine d’Amoz, à Charrot, qui pose sur son étiquette la bonne question : «Y’a koi d’d’an»…
Chasselas en masse et en sous-nombre
En Pays de Vaud (voir les résultats détaillés sur PDF), les assemblages rouges se portent bien, aussi. Le vin vaudois le mieux noté est un Vinzel du Domaine de la Croix, d’Yvan Parmelin, à Bursins, fait de gamaret, garanoir et pinot noir, version en barriques 2005, gratifié de 95,3 points sur 100. Juste derrière, un autre Vinzel, la Cuvée des Druides 2005, du Domaine Delaharpe, de Yann Menthonnex, à Bursins, 93 points, à égalité avec la Côte Rousse 2005, du Domaine du Montet, à Bex, de Charles Rolaz et Fabio Penta (commercialisés par Hammel à Rolle), qui placent d’autres assemblages, la Cuvée Charles-Auguste, du Domaine de Crochet à Mont-sur-Rolle, et le Quatuor, petit frère de la Côte Rousse, parmi les meilleurs rouges vaudois. Seul le gamay Le Satyre 2006 de Noé Graff, de Begnins, s’intercale.
En chasselas 2006 (41% des échantillons, pour 63% de la surface vaudoise cultivée en ce cépage), la Côte fait très fort, même si le Dézaley Clos des Moines 2005, de la Ville de Lausanne, met tout le monde d’accord avec 94 points. Suivent le Haute-Cour (Luc Pellet), à Mont-sur-Rolle, le Domaine de la Couronnette, de René Taurian et Christian Dupuis à Perroy et le Château d’Allaman (blanc) de Schenk. Au final, sur les 14 meilleurs vins vaudois, la moitié proviennent des pieds du Jura (de Nyon à Yverdon).
Pour les connaisseurs, quelques surprises donc, mais, surtout, de Satigny à Sierre, en passant par Vinzel, la confirmation de plusieurs très bons producteurs, régulièrement présents au meilleur niveau.
A Sierre
Un Grand Prix en guise de (fausse) finale
Des jurés de toute la Suisse ont dégusté quelque 1500 vins, fin juin, à l’Hôtel-de-Ville de Sierre, pour le compte du Grand Prix du Vin suisse. Répartis en onze catégories, ces vins provenaient pour la moitié du Valais. Vaud, Genève et le Tessin étaient relativement bien présentés, mais, assure Dominique Rouvinez, le co-président de VINEA, co-organisateur de la compétition avec la revue VINUM, la fréquentation du concours a pâti des problèmes de l’interprofession suisse du vin (lire ci-dessous). Les échantillons de ce concours sont arrivés à Sierre sans passer par des présélections régionales. Six vins par catégorie seront «nominés» et trois primés, selon le nombre de points obtenus la semaine dernière à Sierre, mais ces résultats ne seront pas dévoilés avant le 19 octobre et le «Gala des vins suisses» au Stadtheater de Berne. Une telle compétition devrait se dérouler tous les deux ans. Pour assurer l’impact d’un nouveau Guide des vins suisses, l’an prochain, ce Grand Prix sera toutefois reconduit, puis ainsi de suite tous les deux ans. (PTs)
Article paru dans Hôtel + Tourismus Revue du 5 juillet 2007.
Coup de gueule
Plaidoyer pour une superfinale
omment comparer les résultats des concours, non pas entre eux — impossible ! —, mais les pointages enregistrés dans les mêmes concours ?
A chaque fois, il y a une soixantaine de jurés d’horizons différents (même si la profession, du viticulteur au négociant vins, tend à garder la haute main), répartis en plusieurs tables sur plusieurs jours. Toute tentative d’homogénéiser les dégustations ont échoué jusqu’ici… L’homme n’est pas une machine et les machines, les ordinateurs paramétrés, ne remplacent pas les papilles humaines.
Pour tenter une approche sensée des dégustations, l’idéal serait de mettre sur pied une superfinale, avec deux douzaines des vins les mieux notés, par exemple. Seul risque : qu’un vin qui eût pu être jugé remarquable soit resté sur le carreau au premier round. Mais ainsi, on y gagnerait une identité de vue d’un collège à un moment donné, pour un verdict digne de publication. Les Valaisans vont procéder ainsi cette année avec la superfinale des Etoiles d’or (confrontation des meilleurs pointages des sessions du printemps et de l’été) ; les Genevois font de même avec un petit jury de journalistes sur un thème choisi (cette année, redégustation des assemblages rouges… et c’est un 2006 qui n’a pas obtenu la médaille d’or qui l’a emporté !).
La suggestion s’adresse aussi aux grands concours internationaux liés à un seul cépage. En Suisse, on se gargarise des médailles obtenues à «Chardonnay du Monde», en Bourgogne — mais les vins suisses, même si les dégustateurs sont en majorité non-Suisses, n’y concourent que dans une seule catégorie, celle des vins suisses, et ne sont à aucun moment confrontés à d’autres chardonnays ! Idem au «Mondial du Pinot noir», à Sierre, où le palmarès final aurait une tout autre allure si les meilleurs pointages étaient redégustés dans une finale pour désigner de vrais champions, arguments à l’appui.
Sachant que la dégustation, comme le relevait un jour le journaliste Michel Dovaz, est un exercice qui reflète une impression le jour J, à l’heure H et à la minute M. Autant dire que les dégustateurs, et les vins donc, ont intérêt à être en forme au bon moment !
Pierre Thomas, 4 juillet 2007