Perles des montagnes en Vallée d’Aoste
En marge du Concours du CERVIM
Perles des montagnes à Aoste
Par Pierre Thomas, de retour d’Aoste
Derrière les trois grands que sont la Maison Anselmet, à Villeneuve, la Cave des Crêtes de C. Charrère, à Aymavilles, et la Maison vigneronne des frères Grosjean, à Quart, bien profilés ces dernières années, de jeunes vignerons pointent leur nez. «Il y avait 3’000 ha de vignes en 1900, avant l’industrialisation de la vallée. Il en reste un peu plus de 520 ha. Six caves coopératives assurent 70% de la production, de 2 millions de bouteilles par an. Au total, 42 entreprises embouteillent leurs vins», détaille Massimo Bellocchia, l’œnologue au service de la région. Les encaveurs sont en progression, grâce aux subventions de l’Union Européenne pour maintenir une viticulture vivace en montagne. «Ces dernières années, on assiste à une professionnalisation de l’activité de vigneron, devenu au 20ème siècle un revenu accessoire», se réjouit l’œnologue régional.
L’hommage d’un jeune aux anciens
Deux exemples illustrent cette évolution. A Aymavilles, non loin d’Aoste, en remontant la vallée, au pied du château où se déroule tous les deux ans une exposition des vins (cette année, du 4 au 6 septembre), Didier Gerbelle achève sa maison, au cœur du village. Sa cave, elle, restera dans un ancien garage, où les mini-cuves inox rutilent.
A 22 ans, le jeune homme est fier d’avoir étudié la viticulture et l’œnologie au lycée d’Alba (Piémont). Si son nom est bien français et s’inscrit en blanc sur noir au sommet de ses étiquettes, il s’exprime le plus souvent en patois valdôtain, «le même que celui du Val d’Hérens», dit-il dans un large sourire. Il s’excuse d’être là : «Je suis en cave par hasard, l’essentiel du travail se fait à la vigne». Et il ne veut pas parler de ses quelques treilles de rouge, à 1300 m. d’altitude, du côté de Morgex. Mais il est très fier de son Torrette Supérieur, issu du cépage local Petit Rouge, marié à du Cornalin valdôtain. A ne pas confondre avec le Cornalin valaisan, descendant de deux cépages valdôtains, selon les recherches ADN du Valaisan José Vouillamoz, ce même Petite Rouge et le Mayolet.
Chez Gerbelle, ce Torrette classique le dispute à la cuvée «Perque Na ?» (pourquoi pas ?), elle aussi élevée en fûts, où le Premetta local, à baies roses, ajoute une touche épicée. En attendant le Fumin, autre cépage autochtone promis à un grand avenir, que le jeune vigneron voudrait élever durant cinq ans en barriques. «Les anciens disaient qu’il faut vendanger le raisin deux ans avant que le vin soit fini et ne le servir que trois ans après. Les vieux n’étaient pas fous, bien au contraire !»
Un muscat de derrière les fagots
Du Fumin, il y en a déjà chez Hervé Deguillaume, à La Vrille, à Grandzon sur Verrayes. C’est même le seul vin élevé en fût de la cave, elle aussi battante neuve et à échelle liliputienne. 80% des vins sont écoulés à la table d’hôte de l’agritourisme. Son épouse et ses enfants y réinventent les recettes locales, dans une salle de pierre et de bois rappelant un grotto tessinois. Ces mets sont à l’origine de la dominante rouge en Vallée d’Aoste (un peu plus de deux tiers de l’encépagement), selon Massimo Bellochia : «La longue tradition d’une cuisine grasse et à base de viande, en plus du jambon séché et de la charcuterie, appelle le vin rouge». Etape sur la route des vins du Val d’Aoste et sur la Via francigena, La Vrille se signale encore par son muscat passerillé. Après trois mois de séchage en cagettes, les 1’100 kg de raisins ont donné 400 litres de nectar. Un dessert à lui seul, après l’original sorbet maison au petit-lait.
Eclairage
Un concours panoramique
Paru dans le quotidien 24 Heures du 7 août 2009.l