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Posted on 16 janvier 2005 in Adresses, Restos

Vaulion (VD) — La Bréguette

Vaulion (VD) — La Bréguette

La Breguette sur Vaulion (VD)
La Breguette est ouverte
Il a ouvert une buvette ailleurs qu'à la Pontaise. Blague à part, Philippe Guignard, le confiseur d'Orbe, et ci-devant président du Lausanne-Sports, retrouve ses origines. Car il est né, il y a juste quarante ans, là-haut, à Vallorbe. Il y a de la solidarité derrière la reprise de ce gros chalet d'alpage. Sous le Mollendruz, à 1080 m. d'altitude, avec son chef Thierry Lacroix, le bruncheur d'Orbe donne un coup de main à son ami, le fromager de Baulmes, Freddy Agassis.
Quand il fera le plein, le chalet et ses trois salles boisées, dont l'une avec un carillon de toupins et de chenailles, pourra régaler simultanément deux cents personnes… Ouverte depuis début février, la Breguette est dédiée au terroir vaudois dans sa grande profondeur. Ca commence avec un set de table qui affiche le concours Jean-Louis, comme au Comptoir (lire ci-contre). Ensuite, attaquons par la fondue. Le mélange du laitier de Pomy assure un grain bien lisse, grâce au vacherin fribourgeois, au gruyère, avec une pointe d'alacrité jurassienne, avec de L'Auberson et de la Vallée. La Vallée encore, avec son fromage à raclette — on l'écrit avant que les Valaisans nous coupent la main droite! —, le Combier, qui gratine des cornettes infusées au lait chaud pendant un jour. Cette précuisson longue permet ensuite un apprêt rapide. Comme pour la purée de pommes de terre (des Agria de Mathod), détendue au beurre. Et qui accompagne un «braisé» aux bonnes grosses carottes, présenté à table dans sa cocotte en fonte.
La terrine de porc n'est pas mal non plus, faite à la montagne: «Rien ne vient d'Orbe!», s'offusque Philippe Guignard. Rien, vraiment? Si! Le saucisson d'un boucher urbigène. Parce qu'il a été choisi parmi cent-quarante spécimen vaudois et qu'il est le meilleur! Les escargots ont sué une première fois, avant d'être cuits une seconde et gratinés, dans une sauce à la lie, aux herbettes et aux épices. Vous préférez une salade? Voici un frais mesclun à l'huile de noix de Sévery, saupoudré de sauvages pétales cueillis par le biennommé Grünenfelder, de Vaulion. Et puis, enfournées toutes les deux heures, des tartes aux pommes (de Senarclens), légérement caramélisées, où l'on retrouve la patte du pâtissier.
Avec des prix allant de 10 à 27 francs le mets copieux, Guignard joue gagnant sur son terrain jurassien. Pour le service, le président du LS a trouvé son numéro 10: c'est Jacqueline De Blasio, vice-présidente du club de foot, qui s'y colle, avec quelques pros, dont le fidèle Jacques Nessi. Et dès juillet, Guignard s'en ira respirer l'air du Beau-Rivage de Neuchâtel, racheté par son ami Yves Piaget: le terroir prendra l'accent neuchâteloise. Qué.

La bonne adresse
Chalet la Breguette
Route le Mollendruz-Vaulion
Ouvert tous les jours, non-stop 11 h.-21 h.
Tél. 021 843 29 60

Le vin qui va avec…
Un pinot qui pinote

Prenez cinq chasselas vaudois. Faites deviner les régions dont ils proviennent: ça s'appelle «le Jean-Louis». Pour les rouges, c'est plus difficile. L'autre jour, à la Breguette, sur cinq verres de pinot noir vaudois, un seul «pinotait». Le terme est passé dans le langage courant, tant le pinot noir exhale des arômes identifiables de fruits rouges, avec une touche de cerise, pour une élégance inégalée. Cet archétype était celui de Christian Dugon, de Bofflens. Sur ses 5 ha de vignes, 70% de rouge. Histoire de rappeler qu'à l'époque des seigneurs de Nozeroy, au XIVème siècle, les pieds du Jura vaudois appartenaient à la grande Bourgogne. Plus tard, jusqu'au début du XXème siècle, avec 400 ha (contre 170 aujourd'hui), Orbe fut même la principale région viticole vaudoise, réputée pour son rouge. Moins de pluie que sur les rives du Léman, l'influence du joran, des vignes jusqu'à 800 m. d'altitude et un sol argilo-calcaire: voilà les qualités de ces «terres à rouge». Christian Dugon regrette que le pinot noir soit «un peu déprécié». Mais celui-ci, millésime 2002, nous, on l'a bien apprécié! A l'aveugle, et les yeux fermés, si l'on peut dire.

Chronique de Pierre Thomas, parue dans Le Matin-Dimanche, en février 2004.