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Posted on 16 janvier 2005 in Vins italiens

Leçon de dégustation à l’italienne

Leçon de dégustation à l’italienne

Douze Chianti Classico jugés au palais
Leçon de dégustation à l'italienne
Sorti de sa fiasque, le chianti, depuis vingt ans, s'est donné des lettres de noblesse toscane. Que cachent les bouteilles vendues dans les grandes surfaces à un prix similaire (entre 10 et 20 francs)? Les surprises d'un test qui a valeur de leçon pour le consommateur.
Par Pierre Thomas
C'est qu'il y a de quoi se perdre parmi les collines toscanes… Le chianti (tout court ou des collines environnantes, Colli Senesi, Colli Aretini, Colli Fiorentini) couvre une vaste étendue et donne une marée de 700'000 hectolitres de vin par an. Entre Florence et Sienne, seul le cœur de la région a droit à l'appellation Chianti Classico (260'000 hl). Première confusion, le «simple» chianti est une «dénomination d'origine contrôlée et garantie» (DOCG) tout comme le Classico. Tous deux arborent donc une bande rose, où figure un numéro de contrôle, à cheval sur la capsule recouvrant le bouchon. Les bouteilles de Chianti Classico devraient être reconnaissables à un emblème, un coq noir sur une collerette. Pourtant, nombre de grands producteurs préfèrent renoncer à cette marque distinctive: sur les 260'000 hl produits en 2001, 175'000 hl, seulement, étaient estampillées «gallo nero».
Un cas suisse
Fait exceptionnel, alors que, depuis 1996, le décret du Chianti Classico mentionne que les vins sont mis sous verre dans la zone de production, la Suisse, elle, est au bénéfice d'un accord avec l'Italie. Il permet aux négociants helvètes de mettre en bouteilles le chianti chez eux et de les sceller avec la bande rose… Reconduit tacitement depuis sa signature en 1995, cet accord se base sur une législation de 1961, qui pourrait être renégociée dans le contexte européen, explique Philippe Hunziker, le directeur de la Commission fédérale du contrôle des vins.
L'accord oblige, toutefois, les Suisses à préciser où l'embouteillage a eu lieu: c'est la seule distinction visible pour le consommateur. Cela paraît être la moindre des choses et, pourtant, c'est un cas particulier, puisque notre pays, au contraire de ceux de l'Union européenne, n'a pas rendu obligatoire la mention sur l'étiquette du lieu d'embouteillage. Concrètement, un côte-du-rhône importé en vrac ne portera pas la mention «embouteillé en Suisse», un chianti, si.
Changement de style en vue
Dans notre pays, le Chianti Classico jouit d'une bonne réputation: la Suisse, avec 8% des exportations (70% du Chianti Classico est consommé hors de l'Italie), occupe le quatrième rang, loin derrière l'Allemagne et les Etats-Unis (plus de 60% des exportations à eux deux) et l'Angleterre (11%).
Vin d'un prestige certain, le cru toscan est à la croisée des chemins. D'ici 2005, les producteurs ne pourront plus y ajouter un pourcentage assez élevé de raisins blancs (trebbiano et malvasia del Chianti, jadis jusqu'à 30%!) à la «recette» élaborés par le Baron Ricasoli au 19ème siècle, avec du canaiolo et, surtout, du sangiovese. Désormais, les Chianti Classico pourront même être issus exclusivement de sangiovese, ou de 80% de sangiovese au minimum complété par l'un ou l'autre (ou plusieurs…) cépages, comme le canaiolo, mais aussi la syrah ou le merlot. Le vieillissement des Riserva est ramené à deux ans (dont 21 mois dans des fûts, souvent anciens).
Meilleur à table
Délicat à vinifier, supportant une garde en cave moyenne (autour de cinq ans), le vin tiré du principal raisin toscan traduit le climat. La dégustation l'a montré: 1999 surpasse 2000. La règle du millésime impair supérieur au pair est valable pour toute la dernière décennie, à l'exception de 1990. Et ça continue avec un 2001 de bonne cuvée…
Grâce aux procédés de vinification moderne, le chianti a déjà changé. Jean Solis déplore qu'on n'ait pas perçu, dans cette dégustation, la pureté du sangiovese. «Le chianti est un vin pour la table, pas pour des dégustations!», réplique le sommelier Claudio De Giorgi. «L'acidité, l'alcool et les tanins, parfois secs, sont trois éléments qui caractérisent le sangiovese. Les deux premiers se marient fort bien avec des plats un peu gras. Le sangiovese s'en sort ainsi mieux à table que dans une confrontation.»
          
Article paru en novembre 2002 dans le magazine de consommation Tout Compte Fait.