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Posted on 13 février 2006 in Adresses, Restos

Jura Bernois (JB) — Les Ecorcheresses

Jura Bernois (JB) — Les Ecorcheresses

Les Ecorcheresses (Jura bernois)
Entre mirettes et fourchettes
En hiver, l’endroit paraît perdu : à Moutier, il faut suivre le panneau Perrefitte, monter quelques virages, dans une étroite vallée qui, peu à peu, s’élargit. Sur un replat, un village à la sonorité médiévale, Les Ecorcheresses. C’est là qu’après avoir tenu quelque temps un restaurant au village suivant, Souboz, les Falleger-Forycki se sont établis, dans l’ancien «Relais des Chasseurs», il y a quelques années.
Un concerto de Carl-Emmanuel Bach en sourdine dans l’oreille, la moustache des chattes tricolores curieuses au mollet, on s’installe dans un décor étrange. Ouvrez les yeux ! A la fois brocante, avec sa collection de poussettes, de poupées et de tête de femmes ; Saint-Valentin permanente, avec ses roses fraîches sur chaque table et l’éclairage à la bougie, y compris aux lustres, et jardin extraordinaire, avec des plantes vertes entre chaque élément, sous le beau plafond à poutres.
Presque comme chez soi
A portée de chaleur d’un poêle, on se sent comme à la maison — une demeure où l’on a l’impression de remonter le temps. Claude Falleger est à la fois au service et à la plonge… Sa femme, Margret, on ne la verra pas de la soirée, affairée seule aux casseroles. Ici, le menu est unique, sans échappatoire, à 48 francs. Et la cave constituée des coups de cœur du patron.
Tout commence par un apéritif maison : un kir, où le sirop de sureau épouse la forme d’un cœur gelé qui s’étiole de rouge à mesure qu’il se réchauffe. Après une salade printanière, un potage de courge parsemé de persil s’accompagne d’un croquant croissant au jambon. Suit un vol-au-vent, garni de champignons de Paris, de pleurotes et de chanterelles, dressé sur une assiette de verre. Dans un registre plus paysan, une tranche de veau à la crème, avec une garniture de petits légumes et de chou rouge. Sorbet orange, dattes et mousse de châtaigne pour terminer.
Curieusement, le décor et l’accueil nous ont paru plus «à la maison» que les mets, où l’assaisonnement paraissait, ce soir-là, manquer de personnalité. Mais c’est une cuisine du cœur, faite avec des produits de la région : un paysan apporte ses légumes, le boucher le veau, le laitier les fromages.
De la table à la maison d’hôte
Avant de reprendre un restaurant, le couple, spécialisé en pédagogie sociale, s’occupait de handicapés dans la campagne zurichoise, à Uster. Seul le bouche à oreille fait connaître cette adresse. «On est dans un endroit un peu sauvage et perdu», s’excuse la patronne. Mais qui évolue : le menu peut comporter du poisson en fonction de l’arrivage… Et puis, dernière acquisition du couple, quatre fauteuils dodus pour un coin fumoir. En attendant de réaménager trois chambres, dans une maison aux fondations en dur, mais en bois dans ses superstructures, datant d’un bon siècle et demi. A l’écart des grands axes, la police du feu ne badine pas avec le règlement. Un jour, peut-être, la maison, qui a déjà sa «table d’hôte», au sens premier du terme — l’hôte étant celui qui reçoit ! —, les logera, à pied ou à cheval. Par exemple de retour de la Tour du Moron, juste en face, à une heure et demie de marche, par un agreste vallon comme seul sait en cacher le Jura. A 1345 m. d’altitude, et deux cents marches à escalader, la tour, dessinée par Mario Botta, construite par sept cents apprentis, offre un coup d’œil, au-dessus du brouillard hivernal, de la couronne immaculée des Alpes à la ligne bleue des Vosges.

La bonne adresse
Les Ecorcheresses
Tél. 032 484 92 24
Ouvert du mercredi midi au dimanche midi.

Tiré de la cave
Le diolinoir, un superpinot
De Satigny (GE) à Salquenen (VS), le diolinoir se fait une place (76 hectares). Dans les années 1970, feu André Jaquinet l’avait conçu à Changins pour anticiper l’interdiction du coupage des vins rouges suisses par des vins «médecins» étrangers, effective seulement depuis la prochaine vendange (2006). Ainsi, il est très coloré et neutre de goût. «Avec un bon tanin, il laisse dominer sa force ; c’est un vin solide, à l’image du vigneron», résume le site Internet de la Cave au Clos, de Paul Briguet, à Saillon. Les Ecorcheresses servent, en millésime 2002, le dernier né de la petite cave valaisanne. De robe violine, ce diolinoir, de structure moyenne, nous est paru issu de jeunes vignes. Mais, à la fois fin et corsé, il ne reniait pas son ascendance. Car ce «nouveau cépage» est issu du Rouge de Diolly et de pinot noir. Le premier, importé par Henry Wuilloud vers 1940, sur le domaine homonyme de Sion, est le Robin noir de la Drôme française. Cépage-mère, il a été fécondé par du pollen de pinot noir valaisan (croisement de Rouge de Diolly et de pinot noir) pour donner naissance au nouveau cultivar.

Rubrique du Matin-Dimanche du 11 février 2006.