Valais — Les six stars du millésime 2008
Etoiles du Valais 2009
Les six stars du millésime 2008
Pour la quatrième fois, l’Interprofession de la vigne et du vin du Valais (IVV) a confié à un jury d’experts le soin de désigner les «stars» parmi les étoiles du Valais. Le portrait des six vainqueurs 2009, pour le millésime 2008.
Pierre Thomas
Comme on dit en Suisse, ces champions sont la «crème de la crème» du seul millésime 2008. En deux sessions, au printemps et en automne, quelque 150 producteurs ont présenté 1560 vins à des jurys, pilotés techniquement par Vinéa, à Sierre. Ces jurés ont attribué 163 «étoiles d’or» et 619 «étoiles d’argent» : la médaille distinctive, sur le marché, apparaît ainsi sur 142’000 bouteilles (or) et 444’000 bouteilles (argent).
Les trente-trois vins les mieux notés ont, ensuite, été soumis à un jury, formé de Corinne Clavien, œnologue cantonale valaisanne, présidente de la Sélection annuelle des vins du Valais, Dominique Fornage, parrain de la manifestation qui a succédé au Label Nobilis qu’il avait fondé, Jacques Perrin, fondateur du CAVE SA — négoce qui a fêté cette année ses vingt-cinq ans — et Pierre Thomas, journaliste (www.thomasvino.com).
Seuls six cépages ont eu droit à cette finale : les deux sur lesquels l’IVV fonde ses campagnes de communication, la Petite Arvine et le Cornalin, et, en blanc, le Johannisberg et le Païen/Heida, en rouge, l’Humagne rouge et la Syrah. Pour la première fois, un seul nom est sorti de la dégustation à l’aveugle. Parmi les vainqueurs, trois confirmés, les Fils Maye SA, à Riddes, la Cave Ardévaz, à Chamoson, et le Domaine des Muses, à Sierre, et trois émergents, la Cave Mandolé, à Saillon, L’Orpailleur SA, à Uvrier, et Christophe Rey, à Corins-sur-Sierre. Ils ont été récompensés, début décembre, au Manoir de Martigny, par le président de l’IVV (et de la Fédération valaisanne des vignerons), Eric Germanier, et le directeur de l’IVV, Pierre Devanthéry.
Une Petite Arvine exotique
Avec ses arômes explosifs de fruits exotiques et d’agrumes (citron vert) et sa pointe de salinité finale, la Petite Arvine de Saillon des frères Angélin et Didier Thétaz, de la Cave Mandolé, est bien typée de ce cépage valaisan (150 ha cultivés). 2’000 bouteilles de ce vin ont été produites, mais les frères Thétaz élaborent aussi une Petite Arvine labellisée Fully Grand Cru, le village emblématique du cépage et qui organise, tous les deux ans en novembre, Arvine en Capitales.
Un Johannisberg dans la grande tradition
Sous l’étiquette Feuergold, le Johannisberg des Fils Maye SA est un grand classique de ce négoce centenaire, propriétaire d’une trentaine d’hectares, et qui achète aussi de la vendange. La famille Maye, bien qu’installée à Riddes, vient de Chamoson, le climat le plus favorable au sylvaner, nommé Johannisberg ou plant du Rhin en Valais (232 ha). Ce vin, tiré à près de 20’000 flacons, élaboré par l’œnologue Charles-Albert Fumeaux, explose au nez d’arômes de mangue, de menthe fraîche, sur une belle trame et une finale minérale. Les Fils Maye SA ont été souvent récompensés pour leur traminer aromatique, issu d’une vigne complantée en savagnin blanc (païen) et rose (gewurztraminer).
Un Païen d’une belle densité
Certains considèrent le Païen/Heida (75 ha) comme un vin plus complexe et plus apte au vieillissement que la Petite Arvine. Celui de Michel Boven, de la cave l’Ardévaz, tiré à 5’000 bouteilles, montre tout le potentiel de ce grand blanc : fringant, gourmand, dense et bien soutenu par l’acidité. Michel Boven fut sacré «meilleur vigneron de Suisse», lors du premier concours national en 2004. Depuis, ses vins figurent régulièrement au pinacle des concours nationaux, comme son Muscat, meilleur vin blanc (autre que Chasselas ou Riesling X Sylvaner) en 2007 ou ses assemblages rouges Vent d’Or (cuve) et Ardévine (barrique). A la Cave Ardévaz, sur les 14 ha cultivés à Chamoson, il a été rejoint par son fils Michael.
Un Cornalin bien typé
Grâce au biologiste et généticien José Vouillamoz, on sait désormais que le «Rouge du pays», baptisé en Valais Cornalin, est descendant de deux cépages de la vallée d’Aoste, le Mayolet et le Petit Rouge. «Ressuscité» dans les années 1970, il couvre aujourd’hui 112 ha. Celui du Sierrois Robert Taramarcaz, du Domaine des Muses, œnologue formé en Bourgogne et en Nouvelle-Zélande, exprime toute la typicité de ce cépage dans un vin d’une belle fraîcheur, des arômes caractéristiques de cerise noire, alliés à de la profondeur et de la minéralité. Tiré à 5’000 bouteilles. Le jeune producteur a triomphé cette année au Grand Prix du Vin Suisse en l’emportant, à la barbe des Vaudois, dans la catégorie du Chasselas, avec deux Fendants, l’un classé premier, l’autre troisième.
Une Humagne rouge fraîche et sauvage
Parmi les jeunes producteurs émergents, Christophe Rey, ingénieur œnologue depuis dix ans à la tête de la Cave de la Rayettaz, à Corin-sur-Sierre. En 2007, il avait déjà remporté le titre national dans les «autres vins blancs», avec une Petite Arvine 2006. Son Humagne rouge (2’000 bouteilles) se distingue par de la souplesse et des arômes sauvages, croquants, propres au cépage. Et l’Humagne rouge (125 ha) n’est autre que la fille du Cornalin du Valais, selon les analyses ADN de José Vouillamoz.
Une syrah d’essence rhodanienne
Quand ils parlent de Syrah, les Valaisans se réclament de la haute vallée du Rhône. Ingénieur-œnologue, Frédéric Dumoulin a fondé sa cave L’Orpailleur (7 ha et 2 ha d’achat de vendange) il y a dix ans, à partir de quelques parchets de Syrah et de Petite Arvine. Avec ses arômes frais et épicés et sa montée en puissance, trahissant un beau potentiel, cette Syrah (2’000 bouteilles) rappelle les meilleurs Saint-Joseph rhodaniens. Les Valaisans, qui ont importé ce cépage de Tain-l’Ermitage au début des années 1920, en cultivent aujourd’hui quelque 160 hectares.
Paru dans le Journal viticole suisse, numéro de janvier 2010.