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Posted on 26 février 2010 in Vins italiens

Montalcino: de l’espresso au Brunello

Montalcino: de l’espresso au Brunello

Francesco et Riccardo Illy
Mastrojanni, Montalcino

Du ristretto au Brunello

Depuis deux ans, le groupe Illy Café est propriétaire d’un des meilleurs domaines de Montalcino, Mastrojanni. Avec la volonté de persévérer dans l’excellence. Rencontre sur place, en Toscane, à l’occasion de l’Anteprima.
Par Pierre Thomas
«Deux vins italiens sont connus dans le monde : l’un, c’est le Barolo, l’autre, c’est le Brunello», constate Riccardo Illy. L’ancien maire de Trieste et patron du groupe qui s’est fait un nom dans le café, mais s’est aussi diversifié dans les chocolats, les thés, les marrons glacés et les fruits confits, a racheté un beau domaine de Montalcino, il y a deux ans. Première décision : changer les étiquettes. Car les Illy sont des esthètes, percolateur ou tasses «collectors» sont dessinés par des artistes. Pour Mastrojanni, les étiquettes années 1970 — avec le millésime poinçonné dans la vignette grise — ont fait place à un classicisme intemporel, souligné par un sceau décalé. Une élégance qui sied à Riccardo, 55 ans, en complet, cheveux gris et yeux bleu d’acier, à l’opposé de l’enfant terrible de la famille, Francesco, 58 ans, katogan et pull rose (photo ci-dessous)

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Un détour par la Suisse
Pourtant, si les Triestins se sont implantés dans le vin, c’est grâce à lui… Groupe familial, Illy compte à la tête du secteur café un autre frère, Andrea, 46 ans, qui a étudié la chimie à l’Ecole polytechnique fédérale de Lausanne, et une sœur. La Suisse est bien présente dans l’histoire d’Illy pour une raison particulière : à la fin des années 1960, feu Ernesto, le père de la génération actuelle, racheta l’entreprise. Pour ce faire, il choisit de vendre la marque en Suisse à ses associés d’alors. Aujourd’hui, le torréfacteur Illy Café, à Thalwil (ZH), n’a plus rien à voir avec les cafés italiens, commercialisés en Suisse par Francesco, sous le nom de Café Amici.
Entre sa société à Cham (ZG), son propre domaine à Montalcino, son bateau à Trieste, et son chalet en Engadine, Francesco vit le plus souvent dans son puissant 4 x 4 à plaques zougoises, affichant 80’000 km annuels au compteur. Et si son dos casse, c’est que, pour éviter un camion, à pleine vitesse, il préféra s’éjecter dans le talus par la portière… Photographe à ses heures — il a publié un album sur les Dolomites —, Francesco est tombé amoureux de la Toscane. Il a acquis 60 ha d’oliviers et de terres incultes, le Podere Le Ripi, il y a une dizaine d’années. Puis il a planté 14 ha de vignes, dont un seul est classé en Brunello. Le reste du  sangiovese grosso, le cépage unique du Brunello, merlot, syrah et même pinot noir, donnent des vins d’assemblage.
Entre tradition et modernité
Esprit original, Francesco s’est mis en tête de densifier les ceps, passant de 8’000 pieds/hectares à trois fois plus dans une vigne appelée «bonsaï»… Dans sa petite cave, où s’alignent les fûts de divers formats, son Brunello est bichonné, sur les conseils avisés de Andrea Machetti, un Montalcinais pur jus, administrateur-délégué du domaine voisin, celui des Mastrojanni. Tout naturellement, après le décès du fondateur, un avocat romain, c’est lui qui facilita la vente à Illy.
Depuis 1975, Mastojanni est connu pour des vins qui marient la tradition et la modernité. Le Brunello de base reste trois ans en grands fûts («botti») de chêne, même si le cahier des charges a abaissé ce vieillissement à deux ans. Et pas question de barriques neuves… Le cru, Schiena d’Asino (dos d’âne), est élevé, lui, dans des fûts de 1500 litres, et n’existe que dans les meilleurs millésimes — le 2005 ne sera pas mis en bouteille. Une chose demeure : les Brunellos sont mis en marché après cinq ans en cave (six ans pour le Riserva). Précisément, le 2005 sort de chais, en retrait par rapport aux 2004 et 2006 à venir. Mais chez Mastrojanni, la vendange en une fois, au bon moment, a évité une mauvaise surprise. Et parmi une quarantaine de 2005 dégustés (sélection à découvrir sur www.thomasvino.com), il figure en haut du tableau. Avec ce goût de moka, propre au Brunello traditionnel, qui ne doit rien à l’arabica…
 

Fiche technique Mastrojanni

Propriétaire de 25 ha, dont 15 ha classés en Brunello, 80’000 bouteilles par an, à
Montalcino, www.mastrojanni.com
Les vins sont Importés en Suisse par Caratello, Saint-Gall, www.caratello.ch (site en français)
Dégustation le lundi 15 mars 2010, de 14 à 20 h à l’Hôtel des Bergues, à Genève
 

Mes trois coups de cœur

Rosso di Montalcino 2008
23 fr.

Belle robe, carmin brillant ; nez floral, de violette ; jeune, frais ; finale sur la cerise noire et les fruits à noyau ; un vin jovial, parfait sur des entrées (les fameuses «bruschettas»).

Brunello di Montalcino 2004
44.50 fr.
(en action)
Robe grenat ; nez puissant, d’une belle complexité, avec des notes de moka ; attaque sur les fruits noirs ; bonne acidité ; nuance d’amarena (cerise noire italienne) ; belle longueur et élégance ; sur une viande rouge («bistecca a la fiorentina»).

Brunello di Montalcino Schiena d’Asino 2004
72 fr. (pas encore en Suisse)

Robe pourpre profond ; nez ample, complexe, boisé fin, toasté, et café ; attaque suave ; un beau vin, long en bouche, avec une finale sur l’amande amère ; parfait sur de la chasse, les viandes en sauce, ou des éclats de parmesan.

Paru dans le quotidien vaudois 24 heures du 26 février 2010.