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Posted on 11 janvier 2021 in Vins suisses

Vins suisses : pour en finir avec 2020

Vins suisses : pour en finir avec 2020

Le quotidien «24 Heures» a eu la surprise de voir le «troublion» Alexandre Fischer l’emporter dans son troisième concours du «Vaudois de l’année 2020» — mais qui se souvient des précédents? Auparavant, ce journal avait découvert la «nouvelle patronne du vin suisse». Et 2021 a bien débuté dans Le Temps avec l’idée de vin suisse «Fair trade» — une idée un tantinet réchauffée…

Par Pierre Thomas

La lecture de la presse papier est enrichissante durant la «trêve des confiseurs». Le parcours de la Jurassienne Hélène Noirjean, née à Genève en 1987, grandie à Bâle, bilingue, ayant fait «sciences po» à Lausanne, et qui dirige depuis avril dernier la Fédération suisse des vignerons, est pour le moins éclectique. Elle a succédé à Chantal Aeby Pürro, une Fribourgeoise, qui a pris sa retraite, après de bons et loyaux services.

Le temps des «apparatchiks»… et des politiques

On notera qu’Hélène Noirjean a, dans son dernier poste, été responsables des dossiers politiques de l’Union suisse des arts et métiers (USAM), au comité duquel siège le nouvel homme fort du milieu du vin vaudois, Olivier Mark, nommé à fin 2020 président de la Communauté interprofessionnelle du vin vaudois (CIVV). L’avenir paraît être non pas aux femmes et hommes de la terre (et du vignoble), mais aux «apparatchicks» ! Quant à la Fédération suisse des vignerons, elle n’est qu’une des «familles» de l’Interprofession de la vigne et du vin suisse (IVVS). Il se trouve que la directrice de la FSV exerce aussi le mandat de secrétaire générale de l’IVVS.

Ce sont des politiciens qui chapeautent les deux instances : le Vaudois Frédéric Borloz, conseiller national radical, pour la FSV, à qui l’on prête des ambitions de futur conseiller d’Etat, après sa syndicature à Aigle (où il ne se représente pas, ce printemps) et le jeune Tessinois Marco Romano, conseiller national du centre (ex-PDC), pour l’IVVS. Et c’est en général l’opinion de ces personnalités qui est relayée par les médias… Ceux-ci détestent «l’institutionnel» : encore faut-il savoir lire un organigramme. En fait, le «patron du vin suisse» est un Vaudois, Nicolas Joss, directeur de Swiss Wine Promotion.

Il est naturellement en pointe hors discussions politiques qui, parfois, s’enlisent dans les méandres bernois… d’où l’on ressort quelque serpent de lacs alpins comme celui de la conseillère nationale radicale genevoise Simone de Montmollin, présidente de l’Union suisse des œnologues (USOE). Le 16 décembre 2020, elle a réclamé au Conseil fédéral d’«adapter la franchise quantitative et/ou les droits de douane pour le vin» et, ce faisant, de réduire la latitude laissée aux voyageurs d’importer 5 litre de vin sans droit à la frontière, pour «soutenir la filière vitivinicole suisse». Pas un seul chiffre cité…

Comment faire participer toute la filière à l’«effort national»?

Pourtant, des chiffres, il en existait, dès 2013, et ce texte qui figure sur notre site. Un texte qui militait pour l’introduction du «droit d’accise», levé égalitairement sur tout litre de vin, étranger ou suisse, consommé dans le pays. Alexandre Truffer avait repris l’idée dans un édito de Vinum. Aujourd’hui, le principe refait surface par un système d’entraide copié-collé du «lait équitable» lancée en Suisse à fin 2019. Une certaine somme servirait à soutenir le prix du kilo de vendange, car c’est toujours le viticulteur, premier maillon faible, qui perd, quand un vin (suisse) est bradé en supermarché…

Le système du «droit d’accise» oblige les acteurs du commerce du vin (Coop, principal importateur, mais aussi principal vendeur de vins suisses, Denner-Migros, et Fenaco, importateur de vins bon marché mais désormais propriétaire de Provins-Valais, le groupe Schenk…) de mettre au pot commun avec une taxe unique prise sur la vente d’une bouteille de vin, d’où qu’elle vienne. Ensuite, la Confédération, voire l’Interprofession de la vigne et du vin suisse, si elle affirme son pouvoir politique, répartirait la somme en faveur de la production, de la promotion voire même d’un programme d’éducation à la consommation des jeunes. Mais tout cela paraissait trop compliqué jusqu’ici…

Un titre vaudois pour jouer placé

C’est dans ce contexte de brouillard hivernal qu’a émergé Alexandre Fischer, un des meneurs des «Raisins de la colère». Ce fils de vigneron de Lavaux , présenté comme «viticulteur caviste», travaille actuellement chez Yvan Parmelin (notamment au Château Le Rosey). Voilà un homme de la terre qui pourrait, auréolé du prestige de «Vaudois de l’année 2020», secouer le cep… Juste avant que son titre soit révélé par le quotidien vaudois, sur Facebook, il nous avait aimablement demandé si nous ne nous étions pas trompé d’une virgule (de taux de sucre) dans l’opération «Escargot rouge». Je lui avais conseillé de se renseigner à bonne source: une chose est d’agiter le grelot, une autre, d’être au courant des dossiers. Et le président de la Fédération vaudoise des vignerons, le vigneron François Montet, avait appelé ces jeunes éléments à participer directement aux organes officiels — mais peut-être que, comme les journalistes, ils n’apprécient guère l’institutionnel.

Désormais, on attend avec impatience la publication de l’état des stocks de vins suisses pour 2020 (très petite vendange en quantité, notamment en rouge vaudois, mais grande en qualité) et les chiffres de consommation : selon certaines sources, les vins suisses auraient bien résisté à la baisse de la consommation (avec ou sans covid), tant en grandes surfaces que chez les vignerons-encaveurs, qui ont bénéficié d’aides cantonales, tant dans le canton de Vaud (opération welCome) qu’en Valais (auprès de la restauration, quand les établissements publics étaient encore ouverts).

Le 12 janvier 2021, les vignerons ont demandé au Conseil fédéral à bénéficier d’une aide calquée sur celle de la restauration, estimant que la fermeture des établissements publics, prolongée jusqu’à fin février, engendre une perte de chiffre d’affaires de 50 millions de francs par mois en vins.

©thomasvino.ch